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Partage d'infrastructures télécoms: Réduire les dépenses en devises et améliorer la couverture

par M. Mehdi

Ignoré depuis le lancement de la téléphonie mobile en Algérie, le partage des infrastructures télécoms est désormais possible, mais uniquement pour la 4G. Son introduction dans le cahier des charges des licences 4G, non pas comme une obligation, obéissait au souci exprimé aussi bien par les opérateurs que par les autorités.

Les opérateurs y voyaient, dans le lancement de la 4G, moins de deux années après la 3G, des dépenses d'équipements supplémentaires qui allaient alourdir celles déjà engagées. Pour les autorités, la logique, en permettant le partage, était de réduire les dépenses en devises. Mais l'étonnant est que cette clause du cahier des charges de la 4G, sur le partage des équipements n'est pas transférée systématiquement, vers les licences de la 2G et de la 3G. En d'autres termes, si le partage est permis en 4G, il ne l'est pas, du moins formellement, pour la 3G et la 2G.

Le «sharing», ou partage des équipements, est une pratique aussi vieille que la téléphonie mobile. Son adoption était plus un souci d'encourager les opérateurs de garantir un service de téléphonie mobile (et plus tard des services d'Internet mobile) pour les populations des zones rurales et dans zones dites «blanches» où il n'existe aucun réseau mobile.

Ces zones «blanches» existent aussi en Algérie dépourvues de toute couverture. Tout comme il existe des zones rurales, sans Internet fixe, où l'usager n'a le «choix» que pour un des trois opérateurs.

Interrogé à ce sujet, Younes Grar, expert dans les nouvelles technologies et ancien conseiller au MPTIC, estime que ces «zones blanches existent même à Alger». Pour lui, la nécessité d'aller vers une «fédération des équipements, dans les zones et les régions isolées mais également en ville est nécessaire». «Dans les grandes agglomérations, on trouve parfois les antennes des trois opérateurs, à moins d'une cinquantaine de mètres, les unes des autres. Alors que techniquement, il est possible d'installer une seule BTS, plus puissante, pour assurer de la fluidité pour les trois opérateurs. Et au lieu de s'installer dans un même quartier, les deux autres opérateurs pourront aller plus loin et ainsi élargir la zone de couverture», affirme M. Grar.

C'est le client qui paye le surcoût

Pour M. Grar, au-delà du fait que les opérateurs vont acquérir plus d'équipements, «c'est le client qui va payer le surcoût tout en ne bénéficiant pas d'une meilleure couverture, car les opérateurs vont toujours choisir les zones qui leur sont profitables». «Donc plus les coûts des investissements seront réduits, plus les services seront moins chers et de bonne qualité, notamment en couverture».

Et si, concurrence oblige, les opérateurs ne s'entendent pas sur le partage ? «C'est à l'Etat d'intervenir. Pas en les obligeant, mais en accordant des avantages fiscaux, à chaque fois, que des équipements de téléphonie sont partagés entre les opérateurs», affirme M. Grar.

«L'Etat, à travers le régulateur, pourrait demander à revoir les schémas d'installation des stations BTS pour encourager le partage des équipements qui, je vous le répète, est synonyme de gains de dépenses et d'une meilleure couverture», dit-il encore. «Ce qui est gagné en terme d'investissement et de couverture, l'Etat peut envisager de le déduire dans les taxes», explique-t-il.

La problématique de la couverture d'un territoire grand comme l'Algérie, dans un schéma de non partage des équipements, se pose même au nord du pays où il existe des régions, le long du tracé de l'autoroute Est-Ouest, qui ne sont pas couvertes, par l'un ou l'autre des opérateurs, si ce n'est des trois.

Le roaming national

«Faut-il avoir des cartes SIM des trois opérateurs pour rouler sur l'autoroute Est-Ouest afin d'être assuré d'avoir une couverture pour appeler, être joint au téléphone, ou de pouvoir se connecter à Internet ?», s'interroge Younes Grar.

Notre interlocuteur pose, aussi, le problème de l'absence du roaming national. «Je vous parle à partir d'un opérateur, et si entre temps, je passe dans une région où le réseau de cet opérateur est inexistant, la communication va se couper. La solution, pour cela, est pourtant simple. Il s'agit d'instaurer le roaming national. C'est-à-dire que là où le réseau d'un opérateur est absent, la communication est basculée systématiquement sur le réseau d'un autre opérateur. Comment expliquer que les trois opérateurs arrivent à assurer le roaming international, dans plusieurs pays, et pas en Algérie ?», ajoute-t-il. Notre interlocuteur insiste sur la «responsabilité de l'Etat» de pousser vers ces solutions de partage pour assurer une plus large couverture, une meilleure qualité de réseau et une réduction des dépenses en devises. «L'Etat peut, par exemple, exempter de taxes, tout le roaming national». Pour M. Grar, toutes ces solutions vont dans le sens d'une meilleure adoption de la téléphonie et de l'Internet mobiles. «Il faut se convaincre que la mobilité des télécoms et de l'Internet est un atout très important pour l'Economie, pas seulement en terme de recettes que génèrent ces secteurs, mais dans leur apport à la stimulation de la croissance économique et l'amélioration de la qualité de la vie,» affirme notre interlocuteur.