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Terrible constat

par Mahdi Boukhalfa

Terrible aveu : en Algérie, seuls la poliomyélite et le tétanos néonatal ont été éradiqués. Le reste des pathologies infectieuses, dont la rougeole, le paludisme, la méningite, le typhus ou la tuberculose, les plus communes sous nos latitudes, restent encore une menace réelle pour la santé publique. Ce terrible constat a été donné hier par un membre du Comité technique consultatif de vaccination, un organisme rattaché à la Direction de la prévention au ministère de la Santé.

Avec l'épidémie actuelle de rougeole, absurde pour beaucoup dans un pays dont le budget de la Santé pour 2018 est de 392,26 milliards de dinars, soit 3,4 milliards de dollars, ce sont tous les discours rassurants qui tombent à l'eau. Il aura fallu une intervention médiatisée pour sensibiliser les populations cibles à vacciner leurs enfants contre l'épidémie de rougeole actuelle pour que ce constat soit fait. Non pas que cela étonne, mais que l'aveu, presque naïf, vient remettre en question des politiques sanitaires mises en place. Des Algériens, au 3ème millénaire et en dépit de dépenses annuelles de santé colossales, le secteur ayant le troisième plus gros budget de fonctionnement après celui de l'Education nationale et de la Défense, meurent de maladies infectieuses ailleurs oubliées.

L'épidémie actuelle de rougeole, une maladie infectieuse qui n'a jamais jusqu'ici autant fait parler d'elle, a fait au moins six décès et plus de 3.000 cas déclarés. Un tel bilan serait aberrant il y a une dizaine d'années et, pis, il est susceptible d'évoluer avec un taux de vaccination dans les grands centres urbains de moins de 20%. L'un dans l'autre, autant la propagation rapide de la rougeole dans certaines régions du pays que la persistance ou la possible apparition d'épidémies graves comme la tuberculose avec plus de 22.000 cas en 2016 et deux décès montrent à quel point l'Algérie reste loin, en dépit de tous les discours, des standards internationaux en matière de lutte contre les grandes pathologies infectieuses et leur éradication. Et que les moyens mis en place pour assurer aux citoyens une couverture sanitaire adéquate qui les prémunit contre les pandémies sont loin d'être concrétisés dans la réalité.

S'il est vrai que la Santé dans notre pays est victime d'une mauvaise gouvernance et d'une fuite en avant de certains de ses responsables avec ce pathétique et absurde conflit des médecins résidents, il est cependant évident de ne pas jeter l'anathème sur tout un secteur, ni de noircir plus qu'il n'en faut une situation dont les acteurs, en particulier les personnels médical et paramédical en premier lieu, ne cessent eux-mêmes de réclamer des réformes urgentes et une nouvelle loi sanitaire. Mais, la persistance de maladies mortelles comme la tuberculose ou la rougeole, qu'on croyait totalement vaincues, sont encore là, menaçantes, comme pour montrer aux responsables d'un secteur incapable de gérer des crises sociales conjoncturelles que les défis restent importants, dont la bonne gouvernance et des réformes plus qu'urgentes. Pis, qu'ils ont caché cette dramatique vérité aux Algériens qu'ils peuvent mourir de maladies infectieuses qu'ils croyaient naïvement ne plus exister.