Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Une conférence qui inquiète le Makhzen

par Kharroubi Habib

Le choix d'Alger pour abriter les 9 et 10 avril prochain une réunion africaine de haut niveau sur les sources de financement du terrorisme a été très mal reçu par le Makhzen qui se doute bien que le Maroc risque d'être sur la sellette lors de cette rencontre pour être le principal pourvoyeur avéré en drogue des réseaux narcotrafiquants en connexion avec les groupes terroristes sévissant au Sahel auxquels ils procurent l'essentiel du financement leur permettant de survivre et de surmonter les revers militaires qui leur sont infligés.

Anticipant une mise en accusation du royaume pour ce rôle qui est connu de tous, il a décidé de lancer une opération d'enfumage confiée à Abdelhak Khiam, le patron du Bureau central d'investigations judiciaires (BCIJ) en charge au Maroc de la lutte antiterroriste. Lequel vient de se livrer à une grotesque tentative de dédouanement de son pays du lien qu'il a en tant que producteur de drogue avec les narcotrafiquants qui eux-mêmes sont des terroristes ou en cheville avec les groupes armés de cette nature. Le patron du BCIJ a sans craindre le ridicule suggéré que les « séparatistes » (entendre par là bien évidemment le Polisario) seraient la cheville ouvrière du trafic de narcotiques dont les terroristes tirent leur financement.

En fait quand il dit Polisario c'est l'Algérie qu'implique tacitement l'inénarrable Abdelhak Khiam qu'il pointe d'ailleurs en soutenant grotesquement que la situation à sa frontière sud lui échappant, cette zone est devenue propice à tous les trafics auxquels les terroristes s'adonnent pour se procurer le nerf de leur guerre. Pour donner du crédit à ses fallacieuses allégations, le patron de l'antiterrorisme du Maroc a affirmé que « des affaires élucidées au Maroc ont prouvé les liens existants entre le trafic de drogue et le terrorisme et la participation au trafic de séparatistes vivant dans les camps de Tindouf ».

La ficelle est trop grosse mais éclairante de la stratégie de défense que le Maroc entend déployer pour dévoyer le débat qui va avoir lieu à Alger en avril sur le financement du terrorisme qui permet l'entretien de celui-ci en région sahélienne. Le Polisario et l'Algérie en seront les cibles de dérivation. Le Makhzen a beau faire, il ne pourra s'exonérer de l'accusation qu'étant le producteur principal de drogue dans la région (le 1er au monde selon les experts onusiens), il a forcément partie liée avec la connexion narcotrafiquants terroristes. Khiam et ses supérieurs aux plus hauts niveaux de décision du Maroc ne peuvent démentir cette réalité qui permet au royaume d'en retirer une partie financière contribuant substantiellement au budget de son Etat et concomitamment à leur enrichissement.

Il est temps que les Africains abordent sans faux-fuyants la question du financement du terrorisme et appellent franchement dans ce cadre « un chat un chat ». La réunion d'Alger n'aura de sens et ne donnera de résultats que si ses participants ne reculeront pas à faire le bon diagnostic et à déterminer les bons remèdes à appliquer. Elle se doit en tout cas de mettre au pied du mur l'Afrique confrontée au fléau terroriste et débusquer ceux qui prétendent lutter efficacement contre lui tout en entretenant avec de coupables liaisons et relations.