Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Constantine ? Conférence internationale sur la traduction du Coran en amazigh: Plaidoyer pour l'utilisation des caractères arabes

par A. Mallem

Les participants à la conférence internationale organisée hier à l'université des sciences islamiques Emir Abdelkader de Constantine (USIC) autour de la question complexe de la traduction du Coran en langue amazigh ont posé un certain nombre de conditions aux traducteurs. Entre autres, ces derniers doivent avoir une maîtrise parfaite de tous les sens et subtilités des termes coraniques soumis à la traduction, que cette traduction ne soit pas le fait d'un seul individu mais d'un groupe de savants et de chercheurs en sciences coraniques, et en troisième lieu la problématique du choix de l'écriture de la traduction : caractères arabes, tifinaghs ou latins ?

La question sera débattue et critiquée sous tous les angles et sans retenue par une noria de communicateurs qui interviendront durant les deux journées, le 16 et le 17 avril 2017, que durera la conférence.

Toutefois, pour M. Bouabdallah Ghoulamallah, président du haut conseil islamique et ancien ministre des Affaires religieuses qui n'a pas manqué de louer l'initiative prise par l'USIC, pense que «cela va nous faire passer des tentatives personnelles, isolées, à un travail collectif et scientifique. Et c'est ça l'essentiel», a-t-il estimé dans l'entretien qu'il nous accordé hier. «Aujourd'hui, c'est l'université qui va prendre en main cette opération et qui tranchera sur la question épineuse de l'écriture : en caractères arabes, en tifinagh ou en caractères latins comme l'appellent de tous leurs vœux les adeptes de l'école française et l'école européenne».

Il citera l'exemple de la Turquie qui a choisi d'écrire sa langue en lettres latines. «On veut de nous qu'on copie l'exemple turc. Mais nos peuples maghrébins peuvent-ils évoluer en écrivant en deux langues, l'arabe et le français ? C'est très difficile, d'autant plus que nous sommes à la recherche de ce qui unit et non ce qui divise». «En rejetant les caractères arabes, les Turcs n'ont pas réussi parce qu'ils ont abandonné toute leur histoire et leur culture de l'époque ottomane ; histoire et culture que ne connaissent désormais que les spécialistes», ajoute-t-il. Il plaidera finalement pour «l'utilisation des caractères arabes» en disant qu'«il est impensable que chez nos peuples maghrébins il y ait une partie qui écrit en lettres arabes et une autre en lettres latines».

Pour le professeur Hamid Ait-el-Hayane, de l'université de Marrakech, la question de la traduction du Coran à la langue amazigh est imposée par l'actualité culturelle et politique des pays du Maghreb, notamment au Maroc et en Algérie. «La traduction du texte sacré ne peut souffrir d'être prise à la légère parce que c'est un texte qui fait l'objet d'adoration. Les fokaha (exégèses) restent toujours divisés sur cette question. Yadjouz ? Layadjouz ? Les uns ont répondu par la négative arguant du fait que le texte traduit en une autre langue que l'arabe, layadjouz pour la prière».

Mais le conférencier finira par dire que ce débat est dépassé maintenant car la traduction du Coran est devenue une nécessité criarde pour faire passer le message coranique parmi des peuples qui ne comprennent d'autres langues que la leur. Pour ce docteur marocain spécialisé en sciences islamiques, les difficultés de traduction sont nombreuses et diversifiées car certaines expressions dans le Coran revêtent de nombreuses significations. Il citera deux exemples de difficultés : primo, la question fondamentale de l'appréhension des sens des expressions coraniques par le traducteur. Secundo, il n'est pas permis que la traduction soit le fait d'une seule personne, mais qu'elle soit le résultat de groupes de chercheurs. Tertio, la définition des caractères utilisés pour cette traduction : arabes, tifinaghs ou latins.

Terminons en signalant que cette conférence est organisée par l'université islamique en collaboration avec le Conseil supérieur de la langue arabe, du Conseil islamique supérieur et du haut commissariat à l'amazighité, avec la collaboration du ministère des Affaires religieuses et des Wakfs.