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Parlement européen: La syrie et la guerre médiatique

par Bruxelles: M'hammedi Bouzina Med

Lorsque les eurodéputés veulent contrôler la couverture médiatique de la guerre en Syrie et accusent la Russie de lien avec l'Etat islamique, faut-il encore croire à une paix possible en Syrie?

La Commission des affaires étrangères du parlement européen (PE) a inscrit à son ordre du jour pour lundi prochain l'examen de la couverture médiatique de la guerre en Syrie et en Irak. «Confrontés à des campagnes de désinformation agressives de la part de pays comme la Russie et d'acteurs non gouvernementaux, tel l'Etat islamique -EI-, qui incitent à la peur et à la haine, les députés de la Commission des affaires étrangères voteront sur des propositions pour contrer cette propagande. Sensibiliser, renforcer la résilience des médias indépendant, mais aussi augmenter l'initiation à l'information des citoyens de l'Union européenne-UE- en sont quelques exemples», annonce le communiqué du PE. Etrange inquiétude des eurodéputés et étrange façon de concevoir le droit des citoyens à l'information et le devoir des journalistes d'informer. Grave dérive politique qui accuse la Russie « d'inciter à la peur et à la haine» et de l'assimiler à l'Etat islamique «Daech». Dangereuse tentation de mettre sous contrôle les médias et de leur apprendre « la résilience» pour leur propre «indépendance». L'initiative des eurodéputés est d'autant plus incompréhensible quand on sait l'orientation et l'alignement des politiques éditoriales et le marketing de la couverture médiatique des guerres en Syrie (et aussi en Irak, Yémen et ailleurs) totalement affidées aux thèses des gouvernements européens et américain faisant porter la responsabilité de la tragédie de la guerre et sa durée aux seuls Russes et soldats du régime de Bashar El Assad. Les rares médias qui tentent de mettre à jour les véritables raisons et enjeux de ces guerres sont noyés dans le flot des informations tous azimuts qui brouillent la perception des citoyens et amalgament patriotes défendant leur patrie et terroristes et mercenaires à la solde de sombres intérêts géostratégiques. Il ne s'agit pas de défendre un camp contre un autre parce que c'est le peuple syrien qui meurt et s'exile, parce que c'est la Syrie qui risque de ne plus exister dans ce bras de fer entre les Occidentaux et la Russie. Comment les eurodéputés osent-ils accuser la Russie de complicité avec l'Etat islamique alors qu'il y a trois semaines, Américains et Russes avaient décidé de bombarder ensemble les troupes de l'Etat islamique après la trêve qui, malheureusement, a volé en éclats? La probité politique et morale aurait voulu que les Européens relancent cette éventuelle alliance et rejoignent Russes et Américains pour en finir avec l'Etat islamique. En accusant la Russie de lien avec l'Etat islamique et en prenant l'initiative de mobiliser les médias occidentaux sur une si absurde thèse, les eurodéputés de la Commission des affaires étrangères du PE prennent le risque d'hypothéquer définitivement les possibilités d'une reprise du dialogue politique entre Occidentaux (Américains et Européens) et la Russie pour une solution à ce terrible conflit. Au delà de cet énorme risque pour la paix en ces grands moments de crise diplomatique et politique internationale, l'initiative des Eurodéputés trahit le sacro-saint principe de la «liberté de la presse» qu'ils sont si prompts à défendre lorsqu'il s'agit de pays tiers, notamment arabes et africains. Enfin, le hasard veut que cette décision de la Commission des A.E du parlement européen arrive au moment même où la presse américaine et anglaise nous apprend combien le Pentagone américain avait inondé les médias de séquences manipulées de la guerre en Irak. A méditer.