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Logement public promotionnel: Des souscripteurs dénoncent une «arnaque»

par Ghania Oukazi

«Les policiers ont marché en tenue alors que c'est interdit et ils ont eu gain de cause, mais nous, que faut-il qu'on fasse pour que le ministre de l'Habitat ne nous arnaque pas ?»

C'est le cri de désespoir lancé hier par la cinquantaine de souscripteurs au LPP qui s'étaient regroupés dans les alentours du siège du ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme pour protester contre ce qu'ils qualifient d' «arnaque.» Il faut dire qu'ils n'ont pas pu approcher le ministère en raison du nombre effarant de policiers de la circulation et de l'intervention sans compter ceux civils, qui les en ont empêchés. Ils ont été repoussés jusque du côté du Sacré Cœur (le haut de la rue Diddouche Mourad) mais ils ont tenu leur sit-in de 10h à 14h. Pancartes brandies à qui voulait connaître leurs revendications, ils refusaient d'en démordre face aux pressions des policiers qui tenaient à les éloigner le plus possible du siège du ministère. «Formule LPP : Non au crédit bancaire, oui à la location-vente, » pouvait-on lire sur une des pancartes. Ils sont unanimes à reprocher au ministre de l'Habitat de n'avoir pas donné un prix fixe du m2 du LPP. « Le ministre avait dit tout au début du lancement de la formule LPP que le prix du m2 était de 45 000 dinars, il l'a fait passer après à 76 000 DA pour l'arrêter -pour l'instant- à 96 000 DA, il change le prix comme il veut, pourtant celui de l'AADL était fixe,» entendons-nous dire des souscripteurs. Un d'entre eux nous précise qu'il fait partie des 4000 souscripteurs AADL qui ont été transférés vers le LPP. «Le ministre nous a promis que nous étions prioritaires pour le choix des sites, mais on nous a donné le dernier choix, ce n'est pas normal, » s'est-il plaint. D'autres, qui viennent de prendre leur retraite, s'inquiètent «comment payer alors qu'on n'est plus en fonction, depuis qu'on a souscrit à la formule, notre salaire a changé sans qu'on ait pris de logement.» Certains affirment qu'ils ont voulu retirer leurs dossiers mais le ministre a dit qu' «en cas de désistement, on vous enlève 10%, là non plus ce n'est pas juste.» Un groupe d'entre les souscripteurs pense à saisir la justice pour dénoncer ce qu'ils qualifient d' «arnaque et de mensonge.»

Une jeune femme s'inquiète «nous n'avons même pas eu d'affectation alors que nous avons payé 150 millions en deux tranches en 2013 et 2014.» Elle nous fait savoir qu'elle fait partie des 6000 souscripteurs qui n'ont toujours pas reçu d'affectation. «Sur Internet, on vous écrit Non affecté ! Alors qu'on a eu le choix des sites, on nous écrit : Mabrouk aalik ! On se moque de nous !»

«Les contestataires ont chacun un agenda»

Tous reprochent au ministre de leur avoir promis que le LPP sera prêt dans les 24 mois qui suivent la souscription. « On attend depuis plus de trois ans sans rien, » disent-ils. Ils déplorent le niveau du prix de cession qui précisent-ils «a été gonflé pour dépasser le milliard, c'est énorme ! » Les contestataires ont délégué deux d'entre eux pour rencontrer le ministre et lui exposer leurs revendications mais ils n'ont pas été reçus.

Contacté par nos soins, on nous fait savoir que Tebboune était «en conseil.» Des responsables du ministère nous ont de suite répondu à propos du sit-in des souscripteurs que «c'est un non événement, nous, nous n'avons aucun problème dans la formule LPP, il faut qu'ils comprennent que c'est une affaire commerciale, celui qui peut acheter le fait.» Ils soulignent en outre, que « le ministre a tranché la question du prix du m2, il n'a jamais dit qu'il était à 45 000 DA ! » L'on rappelle du côté de la tutelle que «la formule LPP a été décidée pour protéger des cadres qui risquent d'être des proies faciles à des intermédiaires dans la vente de logements. » Ils affirment alors que « l'Etat vend ces logements à trois fois moins que le prix des promoteurs privés et si un F5 LPP atteint ou dépasse le milliard, il faut qu'ils comprennent que ce n'est pas un logement social, avec ça, ce prix est bien plus bas que celui pratiqué par les privés. » A propos des affectations non délivrées, les responsables du ministère de l'Habitat tiennent à noter que «les affectations ne peuvent être données toutes en même temps, elles le sont progressivement, ce n'est même pas une affaire de personnes mais d'informatique, les dossiers qui ont été remis ont été classés par année, par mois, par jour et par? heure, tous ces paramètres comptent dans l'envoi de l'affectation, c'est une question d'organisation et ça marche comme il se doit. » A ceux qui refusent les intérêts bancaires « Riba », ces responsables leurs recommandent « si vous avez de l'argent, payez cash, ça vous évitera Riba, c'est un choix à faire, et ceux qui n'ont pas toute la somme, ils doivent passer par un crédit bancaire (à taux bonifiés) au niveau du guichet unique mis en place auprès du CPA, les souscripteurs savaient tout ça avant de décider d'opter pour la formule LPP.»

Nos interlocuteurs au ministère de l'Habitat lâchent en dernier que «la majorité des personnes présentes au sit-in n'a rien à voir avec les souscripteurs, chacun à son agenda?»