La prolifération des taxis clandestins aux grandes villes de la
wilaya de Chlef inquiète sérieusement la corporation
des chauffeurs de taxi. Ses représentants syndicaux ne cessent de tirer la
sonnette d'alarme et réclament l'implication des pouvoirs publics notamment les
services de sécurité pour mettre le holà à cette activité illégale. De temps à
autre, de timides mouvements de protestation sont organisés ici et là par les
taxieurs pour interpeller les pouvoirs publics sur le sujet mais qui demeurent
apparemment sans suite. L'activité est tout à fait banalisée. Elle ne choque
plus personne, même pas les autorités locales ou les services qui devraient la
combattre. Il faut souligner que de nombreux citoyens ont recours aux services
de ces taxis clandestins du fait que les tarifs sont en dessous de ceux
pratiqués par les taxis agréés et surtout sont disponibles à longueur de
journée. Par exemple, les voyageurs qui débarquent à la gare routière de Hay Houria après 18 heures ne trouveront aucun taxi. Ils n'ont
d'autre choix que de se rabattre sur ces «clandestins» moyennant des tarifs
jugés «acceptables et abordables». Cette demande de plus en plus croissante a
fait que de nombreux propriétaires de véhicules, généralement neuves, ont vite
fait d'exploiter ce créneau juteux dans le but d'arrondir leurs fins de mois ou
pouvoir faire face à l'échéance de paiement de leur véhicule souvent acheté à
crédit. Parmi ces chauffeurs de taxis clandestins on trouve dans une grande
majorité des retraités notamment des entreprises publiques ou de l'éducation
nationale. Parmi ce «lot» de chauffeurs, nous avons rencontré un enseignant, un
comptable, un agent de bureau, un receveur des PTT et un aide-soignant qui ont
tous confié qu'ils exercent le métier de taxi clandestin depuis qu'ils furent
admis à la retraite pour subvenir aux besoins de leurs familles car la maigre
pension qu'ils perçoivent leur permet juste de survivre. Mais cette situation,
si elle arrange certains, d'autres par contre sont fortement pénalisés.
Elle contribue à la faillite
de la profession de taxi du fait des charges fiscales dont sont tenus de
s'acquitter les chauffeurs de taxis. Ainsi, au grand dam des professionnels qui
n'en peuvent plus malgré leurs protestations et leurs démarches qui sont
demeurées vaines, les «clandos» comme on aime à les qualifier, continuent à
travailler et s'arrêtent tranquillement aux «stations» non moins illégales mais
parfaitement situées et embarquent les clients, soit à des prix connus et
agréés, quand il s'agit de courtes distances, soit à des tarifs fixés à la tête
du client quand il s'agit de distances et de conditions particulières. Quant à
ceux qui «ramassent» le client à la gare routière pour de très longs trajets,
le prix est négocié mais toujours en dessous des taxis professionnels. Par
ailleurs, on ne cessera jamais de le dire, les taxis sont le vecteur de l'image
d'une ville. Ils sont généralement le premier contact avec le touriste ou le
visiteur qui débarque nouvellement dans une ville. Les taxis et le chauffeur
sont indispensables aujourd'hui plus que jamais à cause de la grande mobilité
humaine due à l'urbanisation galopante. Ils sont, à un moindre niveau, des
guides touristiques qui peuvent vous faire découvrir une ville, une région en
vous donnant toutes les bonnes adresses et «les bons tuyaux». Enfin, le taximan
doit être de bonne compagnie. La description faite ci-dessus est, faut-il le
souligner, à mille lieues de ce qui se passe en réalité dans les rues de nos
villes. C'est une image idyllique. La réalité est bien malheureusement plus
grave, bien plus triste.