Interdiction ou
gel, l'instruction du ministre du Commerce, Amara Benyounès, sur la vente
d'alcool n'aura finalement pas été au goût du jour. Ainsi, selon des comptes
rendus de presse, les services du Premier ministère ont adressé, hier, une
correspondance au ministère du Commerce, lui demandant de «surseoir» à
l'application de cette instruction «jusqu'à son étude avec les secteurs
concernés dans le cadre des lois en vigueur». On reprochera à Benyounès de ne
pas avoir consulté qui de droit avant de notifier au Centre national du
registre de commerce (CNRC), le 19 février dernier, l'instruction mettant fin à
la demande d'autorisation préalable pour activer dans la vente en gros de
boissons alcoolisées. Cette autorisation, sitôt rendue publique, a créé le buzz
et la polémique et a vite fait d'enfler allant jusqu'à faire sortir ses
opposants dans la rue pour la contester. Cet épisode différemment apprécié par
les professionnels du secteur et les partis islamo-conservateurs renseigne sur
l'absence de cohésion au gouvernement et renforce le sentiment général de la
mainmise d'une catégorie d'affairistes sur les rênes du pouvoir.
Pour M. Hamani, le
président de l'Association algérienne des producteurs de boissons (APAB), dans
une déclaration à El Watan, «M. Benyounès n'a fait que rétablir les choses dans
leur cours normal» affirmant que l'autorisation en question, née de
l'instruction n°88 du 30 janvier 2006, a été introduite de manière «illégale»
par l'ancien ministre de tutelle, El Hachemi Djaâboub. L'instruction de Amara
Benyounès a finalement été rattrapée par la réalité politico-sociale du pays
malgré toutes ses explications. Il avait déclaré à propos de ce dossier que
l'objectif de cette instruction, qui fait partie d'une vingtaine d'autres, est
«de débureaucratiser au maximum un certain nombre de procédures» et d'«annuler
toutes les instructions qui étaient illégales et qui ont été prises sans un
ancrage juridique» en mettant l'accent sur celle relative aux boissons
alcoolisées. «La vente et l'importation des boissons alcoolisées est toujours
soumise à agrément», avait-il encore tenu à préciser, ainsi que leur vente au
détail. «L'ancienne instruction, expliquera-t-il encore, exigeait de chaque
grossiste un agrément, alors que cela relève du décret ou de la loi» mettant
ainsi son département en porte à faux avec la législation en vigueur. Malgré
tout, le ministre a été sérieusement chahuté par les députés lors de son
dernier passage devant la commission parlementaire des affaires économiques. Le
député Abdelaziz Mansour, ancien membre du MSP, confiait à la presse que depuis
l'annonce de cette instruction, 1200 débits d'alcool ont été ouverts à travers
le pays. Le ministre du Commerce refusera, quant à lui, de faire tout
commentaire sur ce sujet. Une campagne a été menée contre l'instruction de
Benyounès, notamment sur les réseaux sociaux. Le ministre des Affaires
religieuses, interrogé plusieurs fois à ce propos, a toujours éludé les
questions. Les premières manifestations publiques ont été enregistrées à
Mechria et Ksar El Hirane.