Le phénomène de la pénurie de vignettes revient chaque année, mais on ne semble lui trouver ni remède rationnel ni explication plausible. D'où la grogne des automobilistes qui se retrouvent encore à courir d'un bureau de poste (ou d'une recette des impôts) à l'autre, pour dénicher le fameux timbre, écoulé à des prix variant selon la puissance de la motorisation et l'âge du véhicule. Pis, la pression se fait sentir cette année plus tôt que prévu. Interrogé à ce propos, le directeur de wilaya d'Algérie Poste (AP) à Constantine, M. Boudjatit, admet qu'«à peine deux semaines après le lancement de la vente de la vignette, le stock est carrément épuisé pour certaines catégories de vignettes à travers les bureaux de poste». Tout en soulignant que le problème est extra-postal, car Algérie Poste participe seulement à la vente des vignettes. Notre interlocuteur nous apprendra que la recette des impôts a accordé à la poste «le tiers de la commande» introduite, chose qui a créé un déséquilibre entre l'offre et la demande au niveau des guichets d'AP. «Nous avons informé notre direction générale à ce sujet et nous avons renouvelé notre commande de vignettes auprès des impôts, mais la situation demeure inchangée pour le moment. La pression sur la vignette va crescendo», relève notre interlocuteur. Les demandeurs passaient, hier, devant les guichets d'AP avec une moue désapprobatrice face au niet quasi automatique des agents. «C'est impensable, on cherche à leur donner de l'argent et on trouve le moyen de nous faire courir pour cela», lance, excédé, un citoyen qui n'arrive pas à se procurer une vignette de 1.500 dinars, la plus demandée sur le marché. Au niveau des impôts, la pression n'est pas moindre.

«Le manque de vignettes au niveau des guichets d'AP, très proche des citoyens, provoque inévitablement une tension au niveau des recettes des impôts, où affluent les automobilistes en masse pour éviter les pénalités de retard», concède-t-on. Pour rappel, l'acquisition de cette vignette, selon un communiqué de la direction générale des impôts, «se fera jusqu'au jeudi 30 avril prochain à 16 heures», et tout propriétaire de véhicule se doit de respecter ce délai «sous peine de devoir s'acquitter de pénalités», mentionne encore le communiqué en question. On tente d'expliquer en ??voix off'' au niveau des impôts cette pression prématurée sur la vignette, dont le stock s'est écoulé très vite, par le fait que la plupart des voitures immatriculées ont moins de 10 ans d'âge. «Le parc auto enregistre une croissance considérable et l'approvisionnement en vignettes des recettes des impôts, elles-mêmes, ne suit pas la demande réelle», argumente-t-on dans ce sens.

Mauvaises prévisions des commandes qu'on prépare sur un long délai d'une année ? Certains pensent que les recettes des impôts, qui devaient satisfaire d'une manière intégrale à la commande d'Algérie Poste pour atténuer la pression, «gardent jalousement» les vignettes à leur niveau pour bénéficier des remises financières concédées au personnel lors de rentrées de caisses consistantes ! C'est que la vignette automobile, instaurée par la loi de finances de 1998, et reconduite chaque année, rapporte annuellement plus de 8 milliards de dinars de recettes, sans inclure celles engendrées par les pénalités de retard.

A Oran, au niveau de la majorité des bureaux de poste et recettes des impôts, certaines catégories de vignettes font défaut. Les automobilistes à la recherche d'une vignette de 1.000 ou 1.500 DA reviennent le plus souvent bredouilles. Interrogé, un employé du bureau de poste Saïm Mohamed (ex-Saint Charles) affirme que «depuis le lancement de l'opération, aucun quota de vignettes de moins de 5.000 dinars n'a été fourni à cette poste». Un employé de la poste El-Moudjahid (ex-Miramar) au centre-ville nous a indiqué que ce bureau n'a reçu aucun quota, comme d'ailleurs la majorité des bureaux de poste.

Du côté des recettes d'impôts, on apprend que les quantités de vignettes qui ont été fournies sont bien en deçà de la demande. Et les vignettes les plus sollicitées, soit celles d'un montant de 1.000 et 1.500 DA, sont rares. Pourtant elles concernent plus de 60% du parc automobile. Des automobilistes ont sillonné plusieurs recettes sans réussir à trouver la fameuse vignette. «D'habitude, cette pénurie est ressentie les derniers jours de la période légale, mais cette année, elle s'est manifestée dès les premiers jours de l'opération», dira un automobiliste à la recherche d'une vignette de 1.000 dinars.

Selon un employé des impôts, de nouveaux arrivages sont attendus au cours de cette semaine.