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Capitale de la culture arabe: A l'épreuve du marché informel

par R. C.

Le commerce informel, déjà source d'une multitude de désagréments en des circonstances tout à fait ordinaires, risque s'il n'est pas éradiqué en temps opportun de gêner le flux engendré par les déplacements des futurs visiteurs de la ville de Constantine et inéluctablement compromettre le déroulement harmonieux de la manifestation ??Constantine, capitale de la culture arabe''.

Les circuits phares des touristes sont pour la plupart investis par des vendeurs à la sauvette et des commerçants informels qui exercent cette activité avec des moyens rudimentaires dénués de toute esthétique, bien au contraire, ils enlaidissent une ville qui se fait belle, depuis des mois, pour accueillir honorablement ses visiteurs.

Ces squatteurs des espaces publics utilisent pour seul moyen matériel de vieux meubles, des tables usées, d'anciennes étagères de placards et même des frigos qu'on met sur les trottoirs en guise de présentoir. Partant de la place de ??La Pyramide'' dans le quartier ??Coudiat'' situé en plein centre, le visiteur doit emprunter impérativement la rue ??Abane Ramdane'', où le commerce informel a élu domicile depuis des années. C'est dire la complexité de la tâche face à laquelle les autorités locales se trouveront confrontées si une opération d'éradication de ce commerce doit se faire en prévision de ce grand événement qui doit être mené dans les meilleures conditions de confort des visiteurs, ceci sans aborder le volet sécuritaire de la question et qui reste aussi à garantir. Sur les trottoirs squattés, on peut trouver toutes sortes de petits commerces, du mouchoir en papier, des jouets, des bibelots bas de gamme, des affaires scolaires, des herbes aromatiques?, exposées parfois à même le sol.

Aux alentours de la maison de la culture ??Mohamed El Aïd El Khalifa'', un autre passage obligé pour le visiteur, des marchands ambulants vendent dans la lisière de cet édifice culturel et sur les allées du jardin limitrophe, devenu passage obligé pour les passants du fait de la fermeture à cause des travaux d'un chemin qui le contournait. Au niveau de la place «La Brèche», des commerçants attirent une foule immense et bloquent la circulation des gens, pour quelques T-shirts ou quelques pantalons jeans seulement, sans oublier qu'à quelques pas plus loin, les cambistes, en faisant du change parallèle de la devise, ont transformé le lieu en un square, ??Port Saïd'' constantinois. Côtoyant ces derniers, d'autres se sont spécialisés dans la vente de certains appareils électroniques usés et dont l'origine, dans la plupart des cas, soulève des doutes. Et le triste dans tout cela, c'est la présence du théâtre régional de Constantine (TRC) où des pièces théâtrales vont faire le bonheur des amateurs du quatrième art, donc un autre passage obligé et en même temps majeur pour les touristes, embourbé par le commerce informel. Dépassant cette place, on arrive à la fameuse ??ex-rue de France'', et c'est là que le phénomène atteint la démesure. Un nombre effarant de jeunes vendeurs à la sauvette investissent terre et murs pour exposer leurs marchandises, même les entrées des immeubles n'ont pas été épargnées, dans une cacophonie hors norme. Des produits allant de l'alimentaire à l'habillement jonchent le sol, entravant la marche des piétons. Un brouhaha assourdissant dans une rue devenue piétonnière et donc le meilleur sentier à proposer aux touristes. Même les façades arrière de la mosquée du Dey Hussein et du musée des arts et expressions culturelles du palais Ahmed Bey, donnant sur la place Chouchène Abdelbaki n'ont pas été épargnées, ces sites touristiques par excellence sont défigurés par ces piles de couvertures, des vêtements et des bibelots bas de gamme. Le même décor s'allonge le long de la rue Chevalley dans la casbah. Sous d'autres cieux, un commerce florissant se tisse autour des sites touristiques bien entendu mais où l'on vend des bibelots produits de l'artisanat local, des buralistes qui proposent des dépliants touristiques, de petits objets rappelant au touriste l'endroit visité ou des personnages historiques ayant marqué la ville, des fleuristes et de petits restaurants offrant la meilleure gastronomie du terroir de la ville. Quelque chose de similaire peut être fait à Constantine ne serait-ce qu'en lançant un appel aux artisans locaux et ceux des autres wilayas algériennes de venir proposer leurs produits au niveau des sites touristiques, ce qui donnerait un aspect plus chaleureux à ces lieux.

Pour rappel, l'éradication du commerce informel a été le but de plusieurs opérations conduites au niveau des daïras d'El Khroub et Aïn Abid mais de pareilles opérations s'avèrent délicates à Constantine, de l'avis des services de la municipalité et des services de sécurité qui estiment, par ailleurs, que l'objectif n'est pas acquis d'avance. «Si on chasse le naturel, il revient au galop», disent-ils. Toutefois ils s'accordent sur l'urgence d'évacuer les sites et les circuits dès maintenant et de ne pas attendre la veille de l'événement pour l'entreprendre, ce qui donnerait un supplément inutile de soucis aux autorités locales.