Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Du pain avec des assiettes vides

par M. Abdou BENABBOU



Aucune différence n'est à percevoir entre les turbulences que connaît ces derniers jours l'aéroport d'Alger et le grand malaise que vit depuis quelque temps l'école algérienne. Ils répondent au même esprit et il serait faux de croire que ce sont seulement les voyageurs et les écoliers qui seraient en otages pris. La mode est au persiflage permanent, avec ses couleurs variées, avec lequel s'est peint tout le pays pour signifier que la prise d'otage s'est généralisée. Il n'y a pas non plus de différence entre la poussée des grèves de tout acabit et les barricades partout dispersées. Eux aussi répondent encore à la marche dévoyée de tout un pays et il serait fatal de penser que ce ne sont-là qu'un chahut d'apartés.

Le ministère de l'Education, par la bouche de son secrétaire général, vient de poser comme incontournable préalable la signature d'une charte d'éthique avec les syndicats. L'idée est séduisante mais elle ne suffit pas.

Le secteur de l'Education n'est pas une île isolée et l'aéroport d'Alger n'est pas non plus un îlot fermé. Les turbulences qui les secouent ne sont pas uniquement des acnés d'adolescence mal assumées mais bien une dégénérescence d'un corps mal formé. L'Algérie subit, elle aussi, sans conteste, son printemps arabe, sauf qu'elle l'accueille à sa manière et tout démontre qu'elle ne veut pas se suffire comme les autres à tourner une page et elle s'échine à l'arracher. Les maux profonds dont tout le peuple est conscient ne sauraient se contenter cependant du remède d'une saison, aussi fleurie d'épines médicamenteuses qu'elle puisse l'être, si tant est que tout est à revoir et que tout est à redéfinir.

Gouvernants et gouvernés se fourvoient dans des a priori suspicieux et égoïstes. Réclamer plus de pain et se presser d'en donner quand les assiettes sont dramatiquement vides est une grossière fuite en avant et une erreur politique.

Sans crier gare, le ministère de l'Education, en tablant sur une charte de l'éthique, ne s'est pas douté qu'il mettait le doigt sur une plus large blessure et que de l'éthique, c'est toute l'Algérie qui en a besoin.