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Branle-bas de combat international : Terrorisme, le cercle vicieux

par M'hammedi Bouzina Med

Le terrorisme au nom de l'islam a gagné en ampleur et en intensité depuis que la « Communauté internationale » l'affronte avec la seule force des armes. Paradoxe.

L'ex-Premier ministre français, Dominique de Villepin, a dit une demi-vérité sur le terrorisme islamiste dernièrement sur la radio internationale Europe 1 : « Il y avait un seul foyer de terrorisme dans les année 90, localisé en Afghanistan. Depuis l'intervention militaire américaine dans ce pays, il y a 15 foyers ». Sauf qu'entre 1990 et 2001 il y avait l'Algérie. Le lapsus de l'ex-Premier ministre reflète très bien l'inexplicable abandon de la Communauté internationale de l'Algérie aux affres du terrorisme islamiste durant toute cette décennie qualifiée de « noire » par les Algériens. L'Algérie a vécu et affronté, seule, dans une grande solitude l'enfer des tueurs du MIA, GIA et autres Ançar de l'apocalypse et du jour dernier. Le rappel de cet « abandon » de l'Algérie aux prises avec l'hydre terroriste n'obéit pas à un quelconque sentiment de « revanche » sur cette Communauté internationale ou le désir enfoui de lui faire expier sa « faute » éternellement. Ce rappel est dicté par l'actualité dramatique qui se déroule sous nos yeux en Irak, en Syrie, en Libye, au nord du Nigeria, aux nord du Mali, en Somalie, Au Yémen et épisodiquement en Egypte, en Tunisie et?encore plus épisodiquement en Algérie et dans bien d'autres contrée du monde. En cela, l'ex-Premier ministre français a raison. Le terrorisme a gagné en intensité et en victimes depuis 2001. La déduction est donc inévitable : depuis que la « Communauté internationale, généralement identifiée aux Occidentaux avec à leur tête les USA, est entrée en guerre contre le terrorisme islamiste, les foyers de guerre et de violence politique menés par des hordes terroristes au nom de l'islam se multiplient et ruinent les pays arabes et africains. Question : pourquoi un tel paradoxe ? Face à la complexité du phénomène terroriste et son ampleur ces dernières années, il apparaît clair que le terrorisme ne peut être vaincu et éradiqué par la seule force des armes, même s'il est évident qu'il faut le combattre sur le plan militaire et sécuritaire. Parce que, au jeu actuel des Occidentaux, les terroristes auront toujours une longueur d'avance sur le terrain. Ce sont eux qui imposent les règles du jeu, puisque les Occidentaux interviennent toujours après que les terroristes ont porté leurs horreurs quelque part dans une contrée affaiblie, jamais avant. Les Occidentaux et la communauté internationale ignorent les politiques et stratégies « préventives ». Le phénomène terroriste ne naît pas soudainement du néant, sans raisons. Il y a toujours des indicateurs sociopolitiques qui précèdent et annoncent la violence terroriste : pauvreté conjuguée à un régime politique dictatorial et inique, ignorance et analphabétisme, démission des élites intellectuelles, manipulation de l'islam par les courant intégristes, silence et souvent complicité de cette Communauté internationale avec des régimes politiques despotiques.. etc. Du coup, croire que l'on peut éradiquer totalement le terrorisme en s'attaquant à sa seule manifestation de violence armée est un leurre. Il s'agit de guérir, en plus de la plaie (la violence), les causes de la plaie. S'attaquer autant aux symptômes de la maladie (la violence) qu'aux causes (virus) qui la provoquent. Si l'intervention en Irak et en Syrie que va mener la coalition internationale contre l'Etat islamique (EI) est plus que capitale, elle ne suffira pas à ramener la paix dans cette région et ailleurs. Les situations politiques dans ces deux pays sont tellement complexes pour que la violence terroriste soit éradiquée par une simple opération militaire, dût-elle durer des années. Sans un plan pour une solution politique qui implique toutes les parties en conflit, la violence resurgira tôt ou tard. Il ne s'agit nullement de réhabiliter Al Assad, mais d'agir à sa marge parmi ses partisans pour une alliance conjoncturelle et qui peut l'isoler lui et sa famille en tant que clan dominant. Si ses partisans sont assurés d'une sortie honorable de la crise qu'ils vivent, ils le lâcheront sans aucune hésitation. Les exemples de ces retournements de situation sont nombreux dans les pays arabes et africains et parfois pour moins que ça. C'est la même logique qui devrait prévaloir dans le cas libyen : lancer comme il se profile une action militaire en Libye sans réunir les protagonistes du conflit, y compris les anciens partisans de Kadhafi, autour d'un plan de paix ne fera qu'aggraver la situation d'anarchie et de violence qui dévore ce pays. L'Algérie n'a pu sortir de la spirale de violence inouïe que lui avaient imposée les groupes terroristes du GIA qu'après avoir compris qu'il fallait conjuguer l'action militaire et sécuritaire à une initiative politique, aussi critiquable qu'elle soit aujourd'hui. Ignorer les raisons qui font naître le terrorisme, c'est lui accorder un permis de survie sans fin.