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Constantine : Restauration de la vieille ville - Un projet et beaucoup d'écueils

par A. Mallem

Répliquant aux dernières déclarations de la ministre de la Culture sur la livraison des projets de restauration lancés en prévision de la préparation de la manifestation de 2015, des chefs d'entreprises des travaux de bâtiment chargées du programme de restauration des anciennes habitations et locaux commerciaux de la vieille ville de Constantine ont estimé que rien de tel ne sera livré à la date prévue s'ils continuent à patauger dans des problèmes inextricables de bureaucratie.

« Les propos de la ministre sont peut-être valables pour les in-frastructures culturelles à restaurer, tels que le Palais de la Culture Malek-Haddad et la maison de la Culture Al-Khalifa, chantiers qui ont été pris par des entreprises qu'on a ramenées d'Alger, mais pas pour les veilles maisons de la vieille ville qui tombent en ruine», ont-ils rétorqué. Et Pour appuyer leurs estimations, ils ont évoqué les retards qu'ils ont connus dans le lancement des projets de restauration à cause, justement, de cette bureaucratie. Aussi, les entrepreneurs que nous avons rencontrés hier matin, M. Benhar Kamel en l'occurrence et son fils Rabah, qui possèdent chacun une entreprise de bâtiment TCE, le premier engagé dans un projet à Bab El-Kantara et l'autre chargé de réaliser le projet de restauration d'une vieille maison familiale située à l'entrée nord-est de Souika, au 5, Rue Mellah Slimane, n'ont pas hésité à s'exprimer sur le programme de restauration des vieilles habitations de la vieille ville lequel, selon eux, est «au point mort à cause des problèmes de retard et des conditions de travail affreuses, mais aussi de la défection des entreprises auxquelles des projets ont été confiés». Et c'est M.Benhar, qui nous a indiqués au passage qu'il est membre du bureau de wilaya de l'Union nationale des entrepreneurs en bâtiment (UNEB), qui est intervenu pour nous décrire avec force détails les obstacles multiples que lui et ses pairs rencontrent chaque jour. «Premièrement, commence-t-il, la Seaco n'a pas fait son travail pour arrêter les ruissellements des eaux souterraines qui coulent sous les habitations. La Sonelgaz, non plus, n'a pas réglé les problèmes de l'électricité et, surtout, du gaz dont les vannes restent ouvertes dans des bâtisses menacées d'effondrement. Et il y a un gros risque de déflagration». Faisant la genèse du projet qu'il n'a pris qu'au mois de juillet 2013 et ce après avoir soumissionné et attendu plus de 18 mois pour recevoir l'ordre de service, notre interlocuteur a insisté sur la difficulté de la tâche en signalant qu'un bureau d'étude de Ghardaïa, doté de moyens autrement plus consistant, s'était désisté du projet en constatant la difficulté de la tâche et les retards générés par les procédures administratives. «Prenons le cas absurde de la caution de garantie de bonne exécution dont la valeur est de 50 millions de centimes mais qui pèse comme un fardeau sur le petit entrepreneur de notre catégorie, explique-t-il. Pourquoi ne pas la remplacer par la procédure de retenue de garantie plus souple et moins contraignante, financièrement parlant ? Mais il a fallu l'intervention du secrétaire général de la wilaya, dans notre cas, pour que cet obstacle soit levé. Maintenant, nous évoluons à l'aise avec la retenue de garantie de 5% que nous réglons à chaque fois que nous livrons une situation exécutée». Nos interlocuteurs se sont étalés ensuite sur les travaux de démolition qui nécessitent des précautions énormes vu la fragilité générale de l'édifice qu'on doit restaurer. «Nous travaillons dans des conditions dangereuses, surtout au cours des intempéries, ceci parce que l'armature des maisons anciennes est faite de bois ancien (Arâar). Devant la précarité des constructions, peu d'entreprises ont consenti à s'engager dans l'aventure», ont-ils révélé.

Et de nous montrer du doigt une maison ancienne qui s'est affaissée dernièrement en bléssant un passant. Interrogé sur le délai que prendra le travail de restauration, M. Benhar a répondu qu'a contrario c'est le travail de démolition qui prend beaucoup de temps. «Nous travaillons dans une maison entourée de tous côtés par des magasins et en prenant beaucoup de précautions pour ne pas provoquer de catastrophe. Et puis, ce qui nous manque ce sont des ouvriers qualifiés pour ce genre de travail. Aussi, le délai d'une année qui nous est imparti n'est pas suffisant.

Mais je peux vous dire qu'une fois la démolition achevée et tous les obstacles levés, nous pouvons nous engager à livrer la maison complètement restaurée avant la date butoir de 2015». Ayant constaté notre présence et notre qualité, des commerçants voisins sont venus nous signaler que des entreprises se sont retirées des chantiers de restauration dans plusieurs maisons familiales. Et ces anciennes demeures restent dans leur état de dégradation chaque fois aggravé par les intempéries.