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A Bejaïa, il y a eu non pas dérapage mais séquence d'un complot contre l'unité nationale

par Kharroubi Habib

Ce qui s'est produit dimanche à Bejaïa n'a pas été un simple dérapage. Les manifestants qui ont empêché dans cette ville la tenue du meeting du camp Bouteflika et s'en sont pris aux journalistes venus couvrir l'événement ont failli faire basculer le pays dans la violence n'eût été la retenue observée à leur égard par les services d'ordre et la décision prise par Sellal d'annuler le meeting qu'il devait animer.

Ce n'est pas un simple dérapage qu'a vécu la ville de Bejaïa, mais un acte délibéré de créer l'irréparable, et le choix de la ville et de la région où il s'est produit a été cyniquement déterminé par les tireurs de ficelles. Ce n'est pas un dérapage mais la séquence avortée d'un complot visant à créer un climat de violence qui justifierait une intervention pour empêcher le processus électoral d'aller à son terme. Les instigateurs n'en sont pas toutefois les boycotteurs et les démocrates qui prônent le changement du système. Ceux-là bien que déterminés à se faire entendre se sont néanmoins interdits de recourir à la violence et leur opposition au quatrième mandat et au système s'exprime pacifiquement malgré les interdits et la répression musclée qui leur sont opposés.

Si à Bejaïa ces deux segments de l'opposition auraient voulu radicaliser leurs mouvements, ils s'en seraient alors également pris aux meetings que d'autres candidats ont tenus dans leur ville, car ce sont aussi des manifestations ayant été organisées dans le cadre d'un processus électoral qu'ils rejettent. Si à Bejaïa seul le meeting du camp Bouteflika a donné lieu à des violences, c'est qu'il était attendu qu'elles dégénèrent car espéré que ce camp n'hésiterait pas à leur répliquer sous la même forme.

Souvenons-nous qu'à la veille de l'ouverture de la campagne électorale, les bureaux de wilaya du RDC de Bougie justement et de Tizi Ouzou avaient rendu public un communiqué mettant en garde qu'ils ont eu connaissance d'indices leur ayant permis de constater que l'on cherche à impliquer la Kabylie dans les luttes claniques du pouvoir. C'est notre conviction que la mise en garde des bureaux du RCD n'était pas que propos alarmiste. Il a été tenté effectivement d'embraser Bejaïa dimanche, et si cela avait réussi nul doute que l'embrasement se serait étendu à toute la Kabylie et probablement au pays.

Qui sont alors ceux qui ont été derrière cette tentative que les démocrates de Bejaïa ont fermement condamnée car allant à l'encontre des valeurs et principes qui fondent leur combat ? Les manifestants qui se sont laissés aller à user de la violence sont certes opposés au quatrième mandat et pour certains sincères dans leur rejet du système, mais ils ont fait l'objet d'une manipulation qui visait à créer les conditions permettant à mettre fin aux revendications démocratiques qui s'expriment avec force dans le pays. Que la manipulation soit le fait de milieux appartenant au pouvoir même n'est nullement à exclure voire à estimer très probable.

Le comité pour le changement qui à Bejaïa œuvre pour l'instauration de la démocratie en est en tout cas convaincu comme le montre le contenu de son communiqué suite aux événements intervenus à Bejaïa. Il y est dit en effet que ce genre de dérapage « menace la nation d'effritement » et que la violence « engendrée » par le système en place « n'est qu'une diversion par rapport aux préoccupations et aux aspirations du peuple algérien » et vise à « compromettre l'avènement d'un Etat démocratique et de droit ».

Prenons garde à ne pas nous laisser entraîner par ceux qui veulent nous pousser vers la violence pour en prendre prétexte pour étouffer le vent de changement qui souffle dans le pays et sachons leur opposer notre détermination à vouloir construire pacifiquement un Etat démocratique débarrassé de la notion clanique et des officines où se trament les complots du genre de celui qui a failli prendre à Bejaïa.