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Au nom d'Allah et du Roi ! Des pirates marocains en guerre contre des sites algériens

par Salem Ferdi

Site en maintenance. C'est ce message qui était affiché, hier, sur le site de la Direction générale des grandes entreprises (DGE) relevant de la Direction générale des Impôts (DGI) qui a fait l'objet d'une attaque piratage. Des pirates marocains qui adorent «Allah et le Roi» revendiquent.

Sur Facebook, un groupe de crétins à la logorrhée hyper-nationaliste se prénommant «MoroccanKingdom Attack» se glorifie d'avoir mené cette action contre le site algérien pour marquer l'anniversaire de la «Marche verte». Le groupe, qui en arabe se nomme «forces de dissuasion marocaine», affirme défendre les «constantes du royaume marocain contre toutes agressions et menaces». En fait, c'est devenu une habitude pour des hackers marocains, probablement directement liés aux services de l'Etat marocain, de mener des attaques contre des sites algériens. Sans conséquence en général que de provoquer l'arrêt momentané de ces sites destinés à l'information du public. Ces sites sur lesquels n'existent aucune forme de transaction ne semblent pas suffisamment sécurisés. Les attaques de hackers consistent à bloquer le site et à y diffuser un message d'ordre politique. L'attaque contre le site de la DGI vient donc accompagner la commémoration de la «Marche verte» et le discours royal traditionnel. Sur la page Facebook MoroccanKingdom Attack, on lit des messages insultants à l'égard des Algériens. Là également, ils ne sont pas inhabituels. Les hackers marocains qui s'attaquent aux sites algériens le font toujours et exclusivement sur le thème du Sahara. Leur discours est totalement conforme au discours officiel à qui s'ajoute la véhémence dans l'insulte.

AU SERVICE DU MAKHZEN ?

D'où des doutes légitimes sur leur degré d'autonomie vis-à-vis des services du gouvernement marocain ou des organisations du Makhzen. Mais bien entendu, on ne peut exclure que des Marocains le fassent sans être nécessairement liés au régime. Mais la teneur générale du discours et des commentaires est d'un conformisme si plat qu'on a tendance à y voir des avatars dégénérés et vulgaires des membres du Makhzen. Il faut dire également que des hackers algériens se sont également manifestés sur la toile mais ils ne paraissent pas faire de fixation sur le Maroc. Ce qu'il faut constater également est que les pirates marocains sont en général actifs contre les sites algériens durant le mois de novembre. Le mois où le Maroc officiel commémore la «Marche verte» et où le roi y va de son discours avec, selon les circonstances, des propos plus ou moins véhéments contre l'Algérie. C'est cette chronologie qui rend légitime de poser la question s'il s'agit d'opérations parrainées par les services marocains ou non. Les attaques contre les sites algériens durant cette période paraissent faire partie du marketing d'accompagnement de l'agenda officiel. Avec le même discours de bas étage que l'on retrouve dans les forums internet où des internautes algériens et marocains s'étripent. Le site du Quotidien d'Oran avait été attaqué en novembre 2008 et on présume que ce sont des hackers marocains qui étaient à l'origine de l'attaque qui a ciblé la page de garde sans affecter les contenus. Le site TSA avait également fait l'objet d'une attaque un mois auparavant.

LA SECURISATION DES SITES EN QUESTION

Les Marocains sont «en guerre» sur le net alors que les hackers algériens paraissent faire dans la retenue et ne considèrent pas le Maroc comme une «cible». Mais à force de s'attaquer à des sites algériens et de les présenter comme une «grande victoire», ces hackers marocains pourraient les conduire à s'y intéresser davantage. Mais au-delà de ces attaques informatiques venant du Maroc sur fond de discours nationaliste plutôt indigent, la sécurisation des sites algériens est une vraie question. L'Algérie reste faiblement connectée et ces attaques ne prêtent pas à grande conséquence. Mais le développement de l'Internet étant inéluctable, cette question de sécurisation des sites électroniques ne peut que prendre de l'importance. Car au-delà de l'image sympa du hacker qui nargue les sites électroniques et se joue de leur dispositif de sécurité, il y a parmi eux des crashers, c'est-à-dire des pirates qui détruisent les données, générant ainsi des pertes importantes pour les entreprises et les instructions. Officiellement, on en est déjà conscient. Il est question depuis des années de mettre en place les moyens de détection des attaques pour protéger les administrations et les entreprises. Visiblement, les choses n'ont pas été encore faites. Le site de la DGI a été trop facilement piraté.