Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Audit des entreprises: Les commissaires aux comptes choisis par appels d'offres

par Moncef Wafi

Les entreprises publiques économiques ne pourront plus choisir pour leurs audits les commissaires aux comptes qui seront, désormais, sélectionnés par voie d'appels d'offres et désignés par l'assemblée générale pour se mettre en conformité avec le décret exécutif de février 2011, relatif à la désignation des commissaires aux comptes.

Les entreprises publiques auront ainsi un mois, comme délai maximal, après la clôture du dernier exercice du mandat du commissaire aux comptes de l'entreprise, pour élaborer un cahier des charges en prévision de la désignation du nouveau commissaire aux comptes. Ce choix est dicté, selon les déclarations de professionnels du secteur faites à l'APS, par un impératif économique, avec la réduction des honoraires, mais aussi par une volonté de mettre fin à un monopole de fait exercé par certains cabinets. Cette sélection se veut également être un frein aux audits de complaisance, décriés par la tutelle, en mettant un peu d'ordre dans la désignation de ces prestataires de service. Cette mesure a été mise en place pour permettre à l'Etat de contrôler les travaux effectués par ces commissaires aux comptes au même titre que les experts-comptables et les comptables agréés, à travers une commission paritaire de contrôle qui sera créée au sein du futur Conseil national de comptabilité, prévu au plus tard début septembre prochain. Constituée de professionnels, des représentants de l'administration des finances, cette commission devra lancer à cet effet des enquêtes sur terrain avec pour objectif, en premier lieu, d'aider les professionnels à identifier leurs besoins en matière de formation pour éviter des audits inadaptés ou erronés.

Cette mesure fait partie d'une série de réformes décidées par les pouvoirs publics dans le but de se réapproprier ses prérogatives de puissance publique, cédées à l'ancien conseil de l'ordre, notamment en matière d'octroi d'agrément et le contrôle de la qualité des travaux comptables. Une réappropriation qui trouve son explication dans le souci de l'Etat de contrôler l'important portefeuille des entreprises publiques. Pourtant, ces réformes ont été violemment rejetées par les professionnels de la comptabilité qui ont créé, d'abord, l'Union algérienne des professionnels de la comptabilité (UAPC) suite à ce qu'ils qualifient de mainmise de l'administration sur l'activité des organisations professionnelles traditionnellement connues, à l'instar de l'Ordre des experts-comptables, des commissaires aux comptes et des comptables agréés. Et décident, ensuite, de demander au chef de l'Etat d'annuler la loi 10-01 relative à la profession comptable. Ils rejettent les nouvelles fonctions dévolues au CNC à savoir la délivrance des agréments, l'organisation des formations, comme ils ne reconnaissent pas les trois ordres élus à savoir l'ordre des experts-comptables, la chambre nationale des commissaires aux comptes et l'organisation nationale des comptables agréés, travailleront comme des syndicats qui s'occuperont de l'aspect éthique et de revendications des professionnels, qu'ils assimilent à une volonté d'émiettement de la profession.

Le même sort est réservé à la commission d'arbitrage, rattachée elle aussi au CNC, et composée de magistrats qui devra statuer sur les différends entre les professionnels et les entreprises qui font appel à leurs prestations de services et aussi trancher sur les conflits entre professionnels eux-mêmes. «C'est un antécédent grave de s'accaparer d'une organisation professionnelle censée être gérée par ses membres au même titre que toutes les organisations professionnelles, par l'administration qui est censée faire de la régulation et non pas de l'immixtion. C'est une forme de renonciation à l'organisation démocratique de notre société et de notre Etat», lit-on dans la lettre envoyée le 1er mars au chef de l'Etat pour demander l'abrogation de la loi 10-01 du 29 juin 2010.