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Manuel Valls à Oran: Un maire français parle de sa ville

par El Kébir A.

Manuel Valls a animé, dimanche dernier, une conférence au Centre culturel français d'Oran. Le thème abordé a porté sur la gestion d'une grande ville de la région parisienne, en l'occurrence Evry, ville où il est maire depuis 2001. D'entrée de jeu, Manuel Valls a déclaré que c'est son engagement aux côtés de Michel Rocard, durant les années 80, qu'il lui a beaucoup appris sur l'Algérie, ajoutant que son lien avec l'Algérie est encore mince à ce jour, «mais il est là!», a-t-il encore ajouté.

 La conférence qu'il a animée a donc porté sur la gestion d'une grande ville «mosaïque et multiculturelle ». En guise d'introduction, un mini-documentaire sur la ville d'Evry, d'à peine quelques minutes, a été projeté, ceci afin que le public présent puisse avoir une idée, de visu, de ce qu'est cette ville qui ne se trouve qu'à 3 km au sud de Paris.

 Une ville peuplée aujourd'hui de 53.000 habitants, et qui doit beaucoup à de Gaulle, qui a eu l'idée de sa création afin de désengorger le Paris des années 50, avec une organisation très pensée, très cartésienne. Manuel Valls a déclaré que c'est au cours d'un mandat local que l'élu retrouve le plus de satisfaction. Et aujourd'hui, dit-il encore, « Evry a un condensé de défis à relever, et cela pareillement aux grands ensembles urbains, qu'il s'agisse d'exode rural, d'immigration? » Evry est également une ville dotée d'un grand centre commercial, le deuxième plus grand de France, ainsi que d'un système de bus des plus performants d'Europe. Mais c'est également, a-t-il souligné, une ville qui peut manquer d'âme. « Il n'y pas de grandes places, comme c'est le cas à Oran avec la Place d'Armes ; du coup, les gens ne peuvent se rencontrer que dans le centre commercial». C'est aussi une ville qui s'est construite avec l'apport de l'émigration, reconnut-il, émigration maghrébine, sub-saharienne, mais également chilienne, du temps où le Chili vivait sous la dictature de Pinochet. C'est une ville, aussi, comme le documentaire l'a souligné, dotée de lieux de cultes pour les trois religions monothéistes.

 A ce propos, il a indiqué que c'était un choix que de construire la mosquée d'Evry à quelques mètres de la cathédrale, et non pas, comme il se fait couramment en France, en banlieue. Cela dit, abordant le chapitre de l'Islam, tout en déclarant avoir voté les lois « anti-voile », il a affirmé être convaincu qu'-Islam-laïcité-démocratie se conjuguent parfaitement. Ceci dit, il a également plaidé, au sein du territoire français, pour la promotion d'un Islam de France. « Je préfère que les fonds de financement des mosquées françaises proviennent de mon pays et non pas du Maroc, d'Algérie, ou d'Arabie Saoudite ». Pour ce qui est du volet «sécuritaire», il a avoué que bien souvent, le problème de la délinquance était lié à la ségrégation et à la précarité. «Quand vous vous appelez Mohamed et que vous êtes d'origine algérienne ou Fatimatou, et que vous êtes d'origine malienne, et que vous venez d'un quartier populaire, vous rencontrerez forcément des difficultés!». Du coup, continue-t-il, étant sans avenir, «beaucoup peuvent être séduits par la prédilection religieuse ou le trafic de drogue? ».

 Il a aussi déclaré être favorable à la double culture plutôt qu'à l'assimilation, et il se dit également contre le communautarisme basé sur le repli de soi, «je suis contre qu'il y ait des ghettos pour pauvres de même que je suis contre qu'il y ait des ghettos pour riches». Abordant la loi française qui oblige toutes les villes de France à construire au moins 20% de logements sociaux, il a déclaré que ce problème ne se posait pas dans la ville, car elle possède déjà plus de 45% de logements sociaux. Cela dit, il a déclaré, sans citer de noms, qu'il existe des maires «qui préfèrent payer l'amende plutôt que de construire ce genre de logements ». Enfin, avant de finir, il a assuré que la société française restait malgré tout «une société très tolérante », et cela contrairement à quelques autres pays européens. Néanmoins il a, tout de même, avoué que le parlement français était loin d'être à l'image de la diversité, et c'est pour cette raison qu'il a salué l'initiative de Nicolas Sarkozy d'avoir inclus dans son ex-gouvernement des personnalités telles que Rachida Dati, Rama Yade, ou encore Fadéla Amara.