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Le retour du «refoulé»

par Belkacem Ahcene-Djaballlah

Deux gros incidents cultuo-culturels ont émaillé le mois sacré de Ramadhan rajoutant ainsi aux stress commercial et financier des citoyens, une dimension haïssable que l'on croyait presque disparue. D'abord à M'chedallah , voilà qu'un imam, empêché de dormir ou de digérer tranquillement son repas, après la prière d'El ?Icha-Ettharawih, s'est mis, par l'entremise de sa sonorisation et ce, en dehors des « heures d'écoute » permises par la loi à descendre en flammes les « mécréants » qui fêtaient, en musique (et ce après avoir eu toutes les autorisations possibles et imaginables), seuls ou en famille, sur la place centrale de la cité, une fin de journée assez éprouvante.

Cela a failli tourner à l'émeute ! Ensuite, voilà qu'un(e) « internaute » allumé(e) par je ne sais qui plus que par le je ne sais quoi, a porté des accusations totalement loufoques (et gravissimes) contre Lounis Ait Menguellet programmé pour un concert à Oran. A l'image de la fameuse députée raciste qui, heureusement, s'est retrouvée devant la justice « pour atteinte à l'Unité nationale ». On a donc eu un concert de protestations avec une Toile en feu et notre immense chanteur-poète national a animé avec succès son concert, en présence d'autorités à l'exception du maire. Bien sûr, tout ceci n'a pas manqué de « réveiller » les chefs des partis islamistes qui, directement ou indirectement ont soutenu les «incendiaires».

Ainsi, ils ont sollicité le ministre de l'Intérieur à l'effet de prendre des mesures fermes en termes de sanctions pour «atteinte à la mosquée». Et, le président d'un parti a même «révélé» (?!) que «les galas sont interdits (?!), durant le mois du Ramadhan où la priorité est réservée à l'invocation de Dieu et la récitation du Coran».

Deux incidents incendiaires, et peut-être bien d'autres non rendus publics, qui démontrent que notre société (et surtout ses vrais et faux «leaders d'opinion » (sic !) se retrouvant parfois dans les cercles officiels, politiques et «intellectuels» (re-sic !), dont la libre expression est favorisée par l'accès aux réseaux sociaux et l'utilisation de pseudonymes) n'est pas encore totalement guérie de ses comportements intolérants tout particulièrement en matière de pratiques religieuses et d'appréhension de l'identité nationale. Contournant ou interprétant, à leur manière, leur humeur et leur ambition, la lettre et l'esprit des textes religieux, ainsi que ceux des textes fondamentaux du pays et exploitant les vides (lorsqu'ils existent et bousculent la vie quotidienne du citoyen) de la gouvernance du pays, de la région ou de la Cité.

A ce rythme-là, avec des «idées» arrêtées sur le devenir de la société que l'on veut uniforme en pensée et en vie quotidienne et pire encore de l'individu que l'on veut transformer à tout prix en «suiviste», on peut dire que nous ne sommes pas au bout de nos peines.