Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

La vraie couleur des «Verts»

par Mahdi Boukhalfa

Ils sont allés jusqu'à faire des photomontages d'Ouyahia en Marine Le Pen. Eux, ce sont les mécontents et les révoltés après les propos peu amènes du SG du RND Ahmed Ouyahia sur les Subsahariens. Des propos qualifiés de ?'xénophobes'' et de ?'racistes'' par les ONG de défense des droits de l'homme, dont Amnesty et la LADDH algérienne. Sur les réseaux sociaux, c'est la tempête, le déchaînement, à la limite de l'hystérie, contre Ouyahia, coupable de déclarations racistes. Les Algériens sont-ils racistes, sinon xénophobes ? Cette question n'a jamais été aussi cruciale que depuis ces dernières années, avec l'arrivée de migrants autant d'Afrique noire que du Moyen Orient et d'Asie, dont les Chinois. En réalité, l'Algérien a toujours appelé un noir, fût-il son compatriote, ?'Nigrou'' (Nègre), ou ?'Lekhal' ou même ?'Oussif'', sans pourtant susciter la colère ni la réprobation de l'interpelé. Car cela fait très longtemps que les termes se rapportant à la couleur des premiers migrants subsahariens en Algérie, des Maliens surtout, n'offusquent personne, car entrés dans le lexique local, mais provoquent un brin de moquerie sans méchanceté. Aujourd'hui, le problème est vécu autrement, et se pose donc la question de savoir jusqu'où le gouvernement va accepter de gérer une situation difficile sur le plan diplomatique, et délicate sur le plan humain avec des milliers de Subsahariens, bloqués en Algérie par le durcissement des mesures de protection des frontières européennes. Maintenant, Ouyahia a-t-il obéi à une humeur noire passagère, sachant que l'homme ne se met jamais en colère, ou bien a-t-il vraiment dit ce qu'il pense de ces Maliens, Nigériens, Nigérians entre autres nationalités ? Et, dans ce cas, il a vraiment dit ce que pensent tout bas beaucoup d'Algériens, y compris certains défenseurs des droits de l'homme, qui ont déjà stigmatisé ces ?'noirs porteurs de maladies, du Sida et d'Ebola''. Il ne faut pas se voiler la face, l'Algérien est peut-être plus xénophobe que raciste. C'est ainsi depuis que les villes sont villes et que les zones rurales sont le terreau des douars et des gourbis. Que n'a-t-on pas vu ce citadin pester contre le comportement niais et se moquer de l'accoutrement des ruraux venus faire des courses en ville, ou pour trouver du travail ? La notion du Oulid Lebled, le ?'Citadin'' ou selon l'expression anglo-saxonne ?'native son'', par opposition au ?'cave'', le rural tout frais débarqué de sa ?'cambrousse'' dans la ville et son underground plein de mystères, a toujours alimenté les chroniques urbaines de ce côté-ci de la Méditerranée. C'est ainsi, l'Algérien n'est pas plus xénophobe ou raciste que d'autres dans la région. Il défend souvent sa culture urbaine par rapport à des menaces d'invasion de son milieu, mais cela ne va pas plus loin. Même si cette appréhension de l'Etranger a toujours nourri des histoires abracadabrantes, en particulier contre les ?'noirs''. Nos parents affirmaient ainsi à qui voulait les croire que la force impressionnante des noirs venait du fait qu'ils avaient un ?'os en plus'' que les blancs. Racisme ordinaire né de la colonisation, c'est vrai. Mais de nos jours, aux portes du 21ème siècle, ce racisme ordinaire fait rire tout au plus les Algériens, qui ont été unanimes à condamner Ouyahia, qui n'est pas allé, heureusement, jusqu'à compter le nombre de ?'noirs'' au sein de la sélection nationale de football, comme l'ont fait tous les tenants de l'extrême droite en France.