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Les nomades et les suffisants

par Ahmed Farrah

À l'approche de chaque rendez-vous électoral, les partis politiques se transforment en chefs de tribus pour ratisser large dans l'arrière-pays, là où les mentalités sont souvent figées dans un clanisme archaïque et agressif. Ce marasme ne semble pas rompre à la pesanteur du passé. L'Algérien nouveau reste encore, replié dans sa tanière moribonde. Même s'il avait quitté son douar ou sa dechra, il n'en est pas moins otage des usages désuets. Son émancipation citoyenne semble être une chimère. Elle a trop duré et ne s'apprête pas à évoluer. Cependant, comme il est coutumier, dans les grandes agglomérations où une certaine (élite) politique se fait remarquer, la « rue » ne dégage ni ferveur ni enthousiasme pour cet événement électoral.

La comparaison entre ce qui se fait ici et ce qui se passe sur l'autre rive frappent les esprits de ceux qui ont une certaine ambition pour le pays mais ne réveille pas le désintéressement volontaire ou involontaire de la majorité. Le niveau de la classe politique algérienne est en flagrante régression par rapport à ce qu'il fut, avant les années 1980, quand la société était largement politisée et son avant-garde animait l'Université, aujourd'hui dans sa torpeur idéologique. La seule idéologie qui reste visible et se fait montrer au grand jour est celle de l'arrivisme et de l'opportunisme mercantile. La plupart de ceux qui aspirent à faire partie de la représentation politique du pays ne jouent pas pour la collectivité. Les uns et ils sont nombreux, veulent s'associer à la prébende et s'assurer des avantages matériels et une retraite dorée, les autres désirent se placer sur le haut de la pyramide à la recherche d'une visibilité et de la notabilité. Sinon comment expliquer le nomadisme de beaucoup de candidats qui n'hésitent pas à changer de dromadaire, au gré et au prix que fixe le propriétaire. Les principes politiques et l'idéologie importent peu ou pas du tout dans la course, l'essentiel est d'arriver comme le montrent ces dizaines de transfuges qui ont changé de partis pour s'arrimer à d'autres qui seraient en mesure de leur exaucer les (vœux). Pour ceux qui affichent leur voisinage avec le pouvoir, leur suffisance et leur prétention sont visibles à des lieux, ils n'ont pas besoin de prouver leur intelligence ou leur perspicacité, ils se suffisent à eux-mêmes, ils sont une institution dans toute sa force, le parti n'est qu'une simple perche qui les mettra en orbite?

C'est tout ce monde qui fait du tort à la noblesse de l'acte politique qui est censé donner l'espoir à un peuple et la force d'un pays.