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Le pays a besoin d'un coup de pouce moral !

par Kamal Guerroua

Cela ne sert absolument à rien de claironner sur tous les toits des idées ou des opinions qui font de l'Algérie une laide caricature aux yeux du monde, juste pour le simple plaisir de «critiquer» ! D'autant que, d'abord d'un point de vue éthique, cela est plutôt mal vu et n'apporte rien de positif à la nation. Deuxième raison, le chantier le plus important et le plus complexe à régler en Algérie n'est-il pas justement «le déracinement de la haine de soi» de la conscience de nos citoyens ? Quiconque constatera par exemple que la tendance générale de la société algérienne de ces dernières décennies est au renoncement et au pessimisme. Partout, les nôtres trouvent assez souvent une facilité déconcertante à se dénigrer, se haïr et se blesser les uns les autres, en s'autodétruisant moralement de l'intérieur et surtout en réduisant, sans raison apparente, les chances de voir la situation de la patrie s'améliorer.

Il en va de même quand ceux-ci se mettent à justifier le pourquoi de la regrettable régression qu'ils subissent, en puisant dans le registre simpliste du fatalisme des clichés du genre : «ce ghachi a ce qu'il mérite», «on peut rien faire, les dés sont déjà jetés» ou « quoiqu'on fasse, le train algérien ne se remettra jamais sur les rails», etc. En outre, les Algériens ont cette habitude, peut-on dire, congénitale d'être des râleurs qui amplifient leurs défauts et minimisent leurs qualités. Une habitude assortie, bien entendu, de cette hésitation têtue et maladroite à baliser le terrain pour une quelconque plate-forme de changement. Il est noté à ce titre que ce «potentiel-râleur» s'est incroyablement accru au fil des années. De cela, personne ne saurait jamais se consoler à court terme tant qu'en amont comme en aval «l'éducation citoyenne» est quasiment défaillante. Ainsi ces obsessions d'orgueil ou d'amour-propre portées, de par le passé, par nos masses à leur point paroxystique se sont-elles, ironie du sort, vaguement atténuées avec le délabrement du «capital révolutionnaire» ceint naguère comme une couronne sur nos têtes. De quoi retourne-t-il en fin de compte ? Manque-t-on de carburant patriotique et émotionnel parce que nous sommes tellement déçus par ces politiques résignés et capitulards qui nous promettent tout mais ne font malheureusement rien ? Ou cette école, la nôtre, ayant trop vogué sur «le chauvinisme hyper-nationaliste» a-t-elle fini par désarçonner, voire désabuser toute une génération de jeunes dont la direction de La Mecque est plutôt désormais du côté de l'eldorado européen ?

D'une manière ou d'une autre, les Algériens n'ont pas su se mettre en valeur et serinent toujours les innombrables tares de leurs élites pour arguer sur les raisons de leur sous-développement. Ce qui explique probablement cette sensation bizarre d'insatisfaction profonde et du «mal-être» qui rejaillit à chaque fois que l'on essaie d'entreprendre quelque chose de rassembleur ou de mobilisateur. Allusion faite ici aux différentes initiatives, tentées çà et là durant des années mais en vain, pour la transition démocratique.