La
mercuriale joue au yo-yo en ces jours de printemps. Les prix sont montés en
très haute pression comme les quantités et la qualité sont plutôt en basse
pression. L'écart entre les prix de gros et de détail est toujours important,
avec des marges allant jusqu'à 50 DA pour la tomate, plus pour les haricots
verts ou certains fruits. Donc, inutile d'aller chercher des prix attractifs
pour le misérable couffin de la ménagère, que ce soit en zones urbaines ou
rurales. Partout, la surchauffe. Il n' y a plus cette naïveté des gens de
l'intérieur du pays qui proposent des prix cléments de produits frais dans le
style du producteur au consommateur sur les bords des routes aux citadins,
excédés par une flambée des prix dans les marchés couverts des grandes villes du
pays. Aujourd'hui, c'est le nivellement des valeurs. Un exemple parmi tant d'autres: dans un marché d'une ville de la côte
centre-ouest, Tenès pour la nommer, la pomme de terre
de saison est proposé à 25 DA/kg et en moyenne à 30 DA/kg toutes variétés confondues,
notamment la ?'rouge'' ou la Désirée de Mostaganem. Quelques dizaines de
kilomètres de l'antique ?'Cartennae'', un lieu dit:
?'Cinq Palmiers'', où le même tubercule est vendu entre 35 et 40 DA, à même la
route nationale aux automobilistes qui rentraient d'un week-end passé sur les
plages de la côte ténésienne. Ceci pour dire une chose: les meilleurs prix des produits agricoles frais ne
sont pas là où on le pense. D'autant que la hausse des prix intervient en cette
saison de fortes productions pour les maraîchages, les légumes, les fruits de
saison comme les nèfles, l'abricot ou la pêche, et même la fraise, commencent à
inonder les marchés, gommant d'un coup la déprime du mois d'avril, avec des
prix hauts et peu de fruits. Or, si la production agricole de saison est là,
elle n'est pas accompagnée d'un redoux des prix, bien au contraire. La tomate
fraîche est encore entre 70 et 100 DA, l'oignon jusqu'à 100 DA/kg alors qu'au
prix de gros il est de 50-60 DA/kg, ou le haricot vert qui a atteint des sommets,
jusqu'à 350 DA/kg dans certains marchés de la capitale, même si ailleurs il est
cédé entre 150 et 200 DA/KG. Même le concombre prend des airs de seigneur avec
un prix au détail allant jusqu'à 100 DA/kg. Et, pour revenir à l'essentiel, se
pose donc la question des raisons de la surchauffe tout à fait surnaturelle,
pour ne pas dire cosmique ou cauchemardesque des prix des produits agricoles
frais et des viandes dans notre beau pays, où la loi de l'offre et la demande
marche si bien que la régulation et le contrôle ont été depuis longtemps
exportés vers une lointaine planète de la galaxie Trabendo.
Car dans nos marchés, les prix sont fixés non pas par des lois et des
règlements, mais par les ?'trabendistes'' du gros et du demi-gros, dans un
secteur où le ministère semble depuis un moment avoir lâché prise. Car en fait,
comment expliquer que les maraîchers crient leur colère pour avoir été obligés
de céder leur production, la pomme de terre, par exemple, à moins de 20 DA/kg,
alors que le même produit est vendu ensuite, après une transition obligée par
deux ou trois intermédiaires, jusqu'à 50 DA/kg.
La pauvre
ménagère, qui attend les fins de mois avec angoisse pour toucher sa maigre
pension, ou le retraité avec plus de trois bouches à nourrir et à vêtir, sont
en réalité les victimes d'une situation qui interpelle depuis des années un ministère du Commerce, qui, hélas, brille par
son absence pour imposer une fois pour toutes les règles du jeu de la
mercuriale. Car celle qui va au marché n'y connaît rien à la
loi de l'offre et la demande, il faut la lui expliquer en revenant aux réalités
du commerce agricole des produits frais: une vraie mercuriale basée sur des
prix de vente qui correspondent aux coûts de production, pas aux lois du trabendo, des trabendistes qui ont fait de l'agriculture
leur terrain de jeux de hasard, où les productions agricoles sont dictées par
les propriétaires de chambres froides et autres opérateurs invisibles qui ont
déstabilisé pour longtemps le marché local des produits agricoles.