En plus
d'être discret, Ouyahia cultive, en privé, un sens
très aigu de la rigueur. D'où son penchant pour la solitude, la tranquillité et
l'évitement des ennuis des gens du sérail, «un peu trop accro aux rumeurs» dit-il! Réservé jusqu'à l'effacement, du moins en apparence, il
ne montre pas la couleur de ses ambitions ni ne répond guère aux provocations
de ses détracteurs, encore moins tire trop sur les cordes pour les forcer à la
riposte. Ce n'est pas une faiblesse de sa part argumente un de ses ex-proches
collaborateurs, au Palais de Gouvernement mais une façon, parmi d'autres, de
regarder du haut ses concurrents potentiels et leur dire avec condescendance :
«eh, les gars, vous êtes très loin! Montez encore...
les escaliers». Peut-être est-ce un complexe d'infériorité dû à la «petitesse»
de sa taille ou une stratégie bien étudiée pour contourner les dangers? Personne ne peut le deviner. Mais on sait bien
qu'en communication moderne, cela s'appelle «technique du décentrage». Une
méthode utilisée dans les débats publics pour déstabiliser un
interlocuteur-adversaire, en l'envoyant sur des thèmes autres que ceux pour lesquels
il est venu débattre! Ça fait d'ailleurs partie d'une
grande philosophie «le porc-épic coincé», ça sent bizarre, c'est vrai, mais dès
qu'on en comprend le sens, on sonde la moitié de la personnalité de «ce
mystérieux Ouyahia». Le principe se résume ainsi en
fait : «quand les autres tirent, lui, il se met en boule et lorsqu'ils
s'arrêtent, il réapparaît à l'horizon, lance ses piques et part à toute
vitesse». On constate, en effet, les mêmes phases ,dans
son duel avec le S.G du FLN, A. Saâdani! Mais d'où puise-t-il
les ressorts d'une telle inépuisable énergie et comment a-t-il appris cette stratégie? A vrai dire, Ouyahia
lit beaucoup, un peu trop même, ça se voit lorsqu'il parle ou discute. Quant à
la télévision, il ne la regarde que pour s'amuser. La série américaine Homer
Simpson par exemple le fait distraire et lui a fait apprendre à prendre à la
légère le sérieux du pouvoir. Et puis, dans les étagères de sa petite
bibliothèque traînent de vieux albums de B.D de Tintin, Aladin et Ali Baba. Des
personnages qui le fascinent sans doute. Au fond, Ouyahia
est le contraire de ce que l'on pense, un gars très rigolo et même sympathique.
D'ailleurs, il s'interroge, toujours, dans sa solitude pourquoi on le traite
avec ce qualificatif de «l'homme de sales besognes», lui, qui n'aime que
rigoler devant ses B.D? «Abracadabra et ça part dans
tous les sens!» Cligne-t-il de l'œil, un jour, en
guise de blague, à Réda Malek, attablé avec lui, autour d'un dîner familial
particulier. - «Mais tu ne te rappelles pas de tes bourdes?» le taquine ce
dernier. - «Mais de quoi tu parles?» réplique Ouyahia,
un suspense terrible ponctuant chaque mot prononcé. - «Tu as jeté des cadres
honnêtes dans les prisons, non?». - Arrête ton cinéma, stp» - «Mais c'est la
pure vérité» - «Non, je te dis!» - «Mais comment
veux-tu qu'on te croie alors que tout le monde en dit le contraire»- «Qui Saâdani?» - «Et ses amis aussi!
Tout le monde...»- «Sacrée plaisanterie! Mais on
dirait que tu ne connais rien à la politique toi!»
«Comment ça? T'as déjà oublié que c'était moi qui t'y ai introduit, durant les
années 1990? Quelle ingratitude!»
«Mais non! Seulement, je voudrais te préciser que tout
cela n'est qu'un cirque!» - «un cirque?» - «Oui! Tout est un montage de mensonges, un simple tour de
rôles entre nous pour tromper les autres, t'as compris?».