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Les gens du Nord !

par El-Houari Dilmi

Un peu comme nos terres cul tivées «à blanc» au Nord, avant d'aller «engranger» notre mauvais blé dans nos ports, jusqu'à quand «l'Algérie utile» sera-t-elle sacrifiée sur l'autel maudit de «l'Algérie inutile» ? Sinon, que peut une fourmi prêteuse face à une cigale voleuse de la sueur «froide» des autres ?! Parce que le Sahara n'est pas forcément une prodigalité sablonneuse, c'est enfoncer une porte ouverte que de dire que le Grand Sud algérien a toujours été le dernier de la classe dans l'inique redistribution de l'incommensurable rente, tirée des revenus des énergies fossiles du pays.

Au-delà de la colère, de son bien-fondé ou non, des habitants d'In Salah contre l'exploration du gaz de schiste, l'on nous parle de près de 150 milliards de dinars consacrés au développement des régions du Grand Sud durant les douze dernières années. Un peu comme celui qui verse une goutte d'eau dans un océan en furie, que peut représenter une telle bagatelle, -convertie en monnaie plus cotée que notre pauvre dinar-, quand on prend la réelle mesure de l'argent fou englouti par l'Algérie depuis le recouvrement du soleil de la liberté ? Autre question sans réponse à ce jour est celle de savoir pourquoi la plus grande portion du pays, toujours considérée comme «inutile», n'arrive toujours pas à faire entendre sa voix fatiguée aux gens du Nord, quand on connaît à quel point ces populations laissées pour compte ont souffert de voir les «nordistes» manger leur pain blanc, sous leurs yeux écarquillés, leur laissant des miettes, tombées par terre, pour seule pitance ? Au-delà de la logique froide, presque scélérate, des chiffres, comment prendre confiance en l'avenir quand on connaît -juste pour l'exemple- que l'argent dégagé (plus de 60 milliards de dinars) pour la manifestation «Constantine, capitale de la culture arabe» siphonnera l'équivalent de l'argent octroyé au développement des vastes régions du Sud, à travers les méandres des différents plans quinquennaux et autres «injazates», posées comme un cautère sur une jambe en bois ?! Faut-il se résoudre à arracher son droit par la force, forcément condamnable, dans un pays où tous les moyens conformes à la loi ne mènent plus qu'à un véritable cul-de-sac ? Seul un partage équitable de la richesse du pays entre tous les Algériens demeure comme l'un des moyens de projeter le pays vers des horizons salvateurs. Donner à vivre à Mohamed pour conjurer la volonté de mourir -dans la dignité- de Larbi n'est certainement pas le meilleur moyen de léguer un devenir -des plus angoissants- à nos enfants. N'est-il pas vrai que l'Algérie, depuis le début du siècle naissant, a tellement gaspillé son temps -et son argent- à entretenir ses trottoirs que tout un peuple se retrouve sur le carreau ?