Peut-on
divorcer de l'Algérie ? La question mérite réflexion mais n'est pas à l'ordre
du jour. Par contre, le divorce tout court est, lui, inscrit à l'agenda de
Bouteflika. Après la loi sur la criminalisation de la violence contre les
femmes, malgré le joker style «Grand pardon», la répudiation et le khol',
comprendre le divorce version féminine, seront revisités par le gouvernement.
Bouteflika ordonne donc à Sellal de charger un comité ad hoc pour voir plus
clair dans les articles relatifs au divorce sous ses différentes formes. Si en
Algérie, un «Moustache» peut divorcer sans donner de raisons, la femme doit
justifier de son droit de divorce sinon elle peut utiliser la carte du khol' en
cas de résiliation du contrat conjugal. Pour le gouvernement, la question est
cruciale, d'actualité plus sensible que le gaz de schiste, la pauvreté et la
corruption réunis. Un enjeu de l'heure qui concerne l'équité du code de la
famille qui, lui, a grand besoin d'un rebootage et d'une actualisation. Ainsi,
et selon le chapitre de la répudiation, version algérienne, l'homme peut
déchirer le livret de famille sans se justifier, au contraire de la femme qui
doit apporter les preuves du bien-fondé de sa démarche. Par exemple, elle doit
prouver que son mari découche depuis quatre mois ou encore qu'il est absent de
la maison depuis une année, voire des trucs impossibles à justifier. Auquel
cas, elle n'a d'autre choix que de demander le khol' à ses seuls torts et en
payant, par-dessus le marché, son mec pour qu'il aille voir ailleurs. Combien
coûte alors un khol' ? C'est à «Moustache» de marchander et s'il a le toit en
prime, c'est tout bénef pour sa pomme. Bouteflika, grand défenseur des femmes
devant l'Eternel, a donc décidé de confier à son Premier ministre la mission de
recadrer le divorce et de le rendre plus équitable. A l'heure de ce grand
chantier, il est à prier que les autres dossiers qui concernent et inquiètent
les Algériens soient traités avec le meilleur des sérieux et la même célérité
pour avoir l'impression d'un homme présent aux manettes de commande. Si
Bouteflika exige, demain, du gouvernement de relancer cette fameuse devise,
chère à nos cœurs, «d'où tu as ça ?» et de demander aux fortunes nationales de
justifier leurs chkaras et comptes en banque à l'étranger, on commencerait même
à croire qu'on possède un vrai président à la tête du pays, qui aime la justice
et son peuple. Si deux jours plus tard, on demandait à tous les responsables
algériens de brûler leur deuxième passeport ou de prendre un billet sans
retour, on sera certain alors que Bouteflika est le président qu'on attend
depuis la démission de Zeroual. Mais pour le moment, attendons de voir si la
femme pourra toujours répudier son mari sans qu'on lui pose des questions
gênantes sur sa vie intime, alors on pourra divorcer de notre gouvernement en
donnant mille raisons, si on nous le demande.