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Front interne, une nécessité dans l'impasse

par Kharroubi Habib

Dans le message lu en son nom par la ministre de la Solidarité nationale à l'occasion de Journée internationale de la femme, le chef de l'Etat a bien entendu transmis ses salutations et félicitations en l'occasion à l'ensemble des Algériennes et rappelé les avancées que leur cause a enregistrées grâce aux mesures et lois prises en leur faveur sous son autorité, tout en ne scellant pas qu'il reste beaucoup à faire pour réaliser l'égalité de droit en Algérie entre femme et homme.

Le président s'est toutefois saisi de l'occasion pour délivrer le message que l'Algérie est à l'épreuve de tentatives de déstabilisation et de retombées de la conjoncture régionale qu'il incombe à toutes les forces politiques du pays de l'en prémunir. Ce qu'elles ne pourront faire, a-t-il considéré, qu'en contribuant au renforcement d'un front uni « au bénéfice exclusif de la nation ». Ce n'est pas la première fois que le chef de l'Etat évoque pour l'Algérie, du fait d'un contexte national et régional à haut risque, à bien des égards, la nécessité de l'adosser sur un front interne à constituer par l'Etat, l'ensemble des forces politiques et de chacune des citoyennes et chacun des citoyens.

Cette invite, il l'avait déjà formulée dans le discours à la nation qu'il a prononcé à l'occasion de sa prestation de serment pour son quatrième mandat. Il avait alors promis qu'il œuvrera à la consolidation du consensus national en créant les conditions permettant de réaliser cet objectif. Une année pratiquement écoulée depuis que l'engagement a été pris par lui, peut-on créditer Bouteflika d'avoir fait avancer le pays sur la voie d'un consensus national et son corollaire un front uni des forces politiques nationales face aux menaces et dangers auxquels il est confronté ?

Seuls les partis qui lui sont inconditionnellement acquis soutiennent que c'est le cas en prétendant toutefois que si le consensus national ne se réalise pas, c'est parce que l'opposition rejette la main tendue présidentielle. Cette même opposition que dans son message à l'occasion de la Journée internationale de la femme le président a mis en garde et appelée à « prendre ses responsabilités pour éviter tout dérapage qui risque de porter atteinte à la stabilité du pays ». L'interpellation signifie que pour Bouteflika ce que cette opposition propose et revendique pour rendre possible un consensus national dont elle admet tout autant la nécessité pour l'Algérie va à l'encontre de la stratégie que lui a mis en œuvre pour atteindre ce but.

Pouvait-il s'attendre à ce qu'elle se rallie à sa stratégie alors que le pouvoir sous son autorité, loin de s'ouvrir à elle et de faire preuve d'écoute à son égard, a verrouillé encore plus ostensiblement le champ politique et réduit celui des libertés de l'expression de parole et du droit à la divergence d'opinion et de solutions ?

Pouvoir et opposition plaident concurremment pour la construction d'un consensus national. Mais chacun à partir de fondamentaux excluant ceux de l'autre. Autant dire que tant que les deux parties s'en tiendront à leurs postures présentes l'un à l'égard de l'autre, la voie vers le consensus national ou le front interne restera bouchée et l'Algérie démunie du puissant rempart qu'ils peuvent être contre les menaces qui la guettent et sont de plus en plus pressantes.