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Le sport en Algérie, une peau de chagrin

par Yazid Alilat

Etre branché aujourd'hui en Algérie, c'est parler football. C'est devenu le «must» des conversations. Pas une ville, pas un village, encore moins les hameaux les plus reculés n'échappent à la vague actuelle sur laquelle surfent les jeunes Algériens, pour la plupart sans emploi et sans le sou. Et, à défaut de parler des crises politiques ou financières, de la baisse des cours du brut qui met la pression sur le gouvernement et la baisse des recettes du pays, on parle football.

Pour autant, on ne parle pas du sport en Algérie, qui est l'un des secteurs les moins développés dans le pays. Le recul des prestations des athlètes algériens dans les différentes compétitions internationales, les participations modestes des clubs sportifs sont en fait le pénible résultat d'une politique de la jeunesse qui a montré depuis les années 1990 ses limites. D'autant que les promesses de l'actuel ministre de rénover cette politique par la réalisation d'infrastructures sportives et une meilleure prise en charge du secteur butent sur une vérité accablante: l'Algérie de 2015 est loin d'avoir les valeurs sportives sûres des années 1980. Pourquoi ?

Parce que les valeurs sportives, les investissements en formation et en encadrement, la gestation et la création des talents des décades précédentes ont été le fruit d'une politique sportive globale, qui était accompagnée par une volonté politique de faire du sport algérien le fer de lance d'un programme de développement global de la société. Un sportif, un athlète était dès lors un élément intégré dans une politique nationale de développement du sportif, dès les jeunes catégories, pour qu'il soit un réel compétiteur dans les grandes compétitions internationales.

Aujourd'hui, hélas, c'est un rêve qui s'estompe, au point qu'une simple décision d'un joueur qui a la double nationalité, Fékir pour ne pas le nommer, fasse l'actualité sportive nationale.

Fékir en vert ou en bleu, blanc, rouge ? C'est le débat affligeant qui anime les travées du football algérien, comme si le sport en Algérie a été superbement réduit à une équipe de 23 joueurs, tous vivant à l'étranger et formés par des clubs étrangers et tous ayant la double nationalité. C'est cet aspect de l'état du sport algérien qui n'émeut plus personne, puisque l'objectif est de gagner et qu'importe les moyens, qui est devenu préoccupant. Une situation qui explique l'indigence du sport en Algérie, en particulier le football qui n'a plus d'écoles dignes de ce nom, aucun centre de formation spécialisé, encore moins des structures pour encadrer les jeunes sportifs.

Le travail des clubs est défaillant et le rôle de la FAF se borne depuis un peu plus de dix ans à mettre sur pied un onze qui peut se qualifier en Coupe du monde ou au moins aux phases finales de la CAN. Rien de plus. L'Algérie n'a jamais remporté deux CAN et la seule fois, c'était à Alger. A côté, les disciplines qui faisaient la fierté du mouvement sportif national se meurent, comme le handball, le volley, l'athlétisme, encore plus le cyclisme ; faut-il dès lors parler de décadence du mouvement sportif national ? A bien des égards, le sport algérien est entré dans une longue période glaciaire. Et ce ne sont pas les coups d'éclat trompeurs de la légion étrangère qui fausseront cette triste image de la fin du mythe des grands athlètes algériens. Faut-il les réinventer ? Avec quoi ?