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Sincérité

par Abdelkrim Zerzouri

Marcher sans se casser la figure. Pari hasardeux dans les pays musulmans où l'élan spontané des populations, religieux, provoqué par l'onde de choc de l'attentat contre les locaux de Charlie Hebdo, a dû fatalement tomber de plein front sur la bêtise humaine. La récupération politicienne, hypocrite, qui épouse le flot des marcheurs. Ailleurs, on a marché, en front uni, pas pour les mêmes idéaux, même si des musulmans ont manifesté aux côtés des « Je suis Charlie », et la parenthèse est fermée sans fracas. Plus de trois millions de personnes ont marché à Paris comme un seul homme. Pas de bousculade. Ni bombes lacrymogènes. Ni aucune haine apparente. Ailleurs, on a cherché l'union dans des moments difficiles. C'est leur droit absolu. Et ils ne viendront pas marcher aux côtés des musulmans, même s'ils partagent leur vision. Ailleurs, aussi, la récupération politique existe, certes, mais tout le monde doit trouver son compte dans l'intérêt général. Fallait-il absolument marcher, sans cette sacrée ambition de récupération politicienne ?! Le bilan des marches est lourd à travers certains pays musulmans, où l'on a enregistré des morts, des blessés et des affrontements violents avec les services de maintien de l'ordre. Un champ de bataille. Une union lamentable. Une image de la force, négative, qui l'a provoquée. Des leaders du mouvement islamiste, politique, se jalousent. Chacun voulant s'imposer guide de la marche, à la recherche d'accointance avec le régime en place, ou de confrontation musclée si l'on se place sur une figure d'opposition. Le Prophète Mohamed (QSSL) mériterait mieux, et si l'on va plus loin dans la lecture du Coran et des hadiths, on comprendrait qu'il aurait mieux valu ne pas marcher du tout. Ne pas débattre à un aussi bas niveau de l'envoyé de Dieu. Ne pas comparer l'incomparable. Terrorisme n'est pas islam, et Charlie ne pourra jamais se hisser à un rang qui n'est pas le sien. Les musulmans sont solidaires avec les familles des victimes, mais ne cautionnent pas la liberté d'expression blasphématoire. Les musulmans ont trop souffert du terrorisme, ils ont perdu des centaines des leurs, des enfants, des femmes, des journalistes, des hommes de culture, des policiers, des militaires, assassinés, et personne ne s'en est ému. On s'en est sortis seuls, sans même avoir la possibilité, le luxe, de trop marcher avec le soutien des personnalités venues d'autres contrées. La réaction émotionnelle ne peut que conduire vers le pire. On l'a vu, on l'a vécu. Commençons par corriger nos défauts flagrants, dans l'intimité, avant de nous mesurer avec d'autres, ou les imiter dans leurs gesticulations. La sincérité en islam, c'est plus fort qu'une marche de cent millions de personnes, c'est une victoire assurée contre l'obscurantisme et autres stigmatisations.