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La balle dans le camp des autorités

par Abdelkrim Zerzouri

Amnesty International (AI) n'en finit pas d'épingler l'Algérie sur la question des droits de l'homme. Dans son dernier rapport 2019, rendu public hier mardi, portant sur la situation des droits de l'homme en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, l'ONG souligne qu'en Algérie, l'année 2019 a été marquée par le «Hirak», un mouvement de protestation pacifique d'une ampleur inédite, qui a connu de nombreuses violations des droits humains. Ainsi, l'ONG relève qu'il y a eu des arrestations arbitraires de centaines de manifestants pacifiques, des condamnations injustes de dizaines de manifestants, la restriction de la liberté d'information à travers des arrestations de journalistes et censure de certains journaux électroniques, la restriction du droit de circuler librement à travers l'installation de points de contrôle et blocage à l'entrée d'Alger, le recours à la force excessive pour disperser certaines manifestations et l'atteinte à la liberté d'expression avec cette utilisation des publications sur facebook comme preuve contre des manifestants.

Un long registre de reproches est, ainsi, établi contre les autorités algériennes durant l'année 2019. Une année, certes, pas trop fière en matière de respect des droits de l'homme, mais il faut souligner également qu'il s'agit d'une année particulière où les droits de l'homme les plus élémentaires auraient pu être complètement piétinés. Le pire a été évité sur ce plan, devrait-on mentionner. Mais, on s'en tient strictement au simple constat sans tenir compte des risques de dérapages incontrôlés qui ont plané sur l'Algérie durant cette année et qui auraient pu souffler la stabilité du pays. Grâce à la sagesse des manifestants, qui ont su sauvegarder le caractère pacifique des manifestations face à de multiples provocations de parties occultes et au professionnalisme dont ont fait preuve les services de sécurité, tous corps confondus, qui ont su également, pour leur part, garder la tête froide dans des moments difficiles marqués par une énorme pression, ce n'est pas seulement les droits de l'homme qu'on a pu protéger mais c'est la continuité de l'Etat républicain qu'on a défendu.

En tout cas, et c'est ce qu'on tente d'en faire objet d'ignorance fallacieuse, pas une goutte de sang n'a coulé durant cette année marquée par un mouvement de protestation impressionnant et historique, une sorte de «révolution permanente» depuis le 22 février 2019, comme le souligne AI. Dire la vérité sur les dépassements commis contre les droits de l'homme est une vocation de cette ONG, mais on devrait se garder d'amputer cette vérité de ses côtés positifs. L'Algérie n'est pas exempte de tout reproche en matière de respect des droits de l'homme durant cette année 2019, exceptionnelle, mais des efforts énormes ont été déployés dans ce sens. Enfin, sur une note d'espoir, qui lui ferait, peut-être, changer de position sur l'Algérie dans son ?rapport 2020', Amnesty International tient à souligner qu' «à quelques jours du premier anniversaire du début du Hirak, nous attendons des actes forts de la part des autorités marquant la rupture avec les pratiques contraires aux droits humains». Quoi qu'il en soit, la balle est bien placée dans le camp des autorités, des nouvelles autorités en place, devrait-on préciser, qui se sont engagées, nettement, à ouvrir une nouvelle page dans le domaine des libertés, de la justice et du respect des droits de l'homme.