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Le FLN face à son destin

par Abdelkrim Zerzouri

Pratiquement toutes les formations politiques ont été dénudées, ces derniers dix mois, par le Hirak, et le FLN, parti majoritaire dans les assemblées élues, paravent de politiciens, de responsables administratifs et de nombreux hommes d'affaires, a plus que les autres subi la lame de fond de la vague de contestation populaire. A tel point qu'il a été incapable de présenter un candidat à l'élection présidentielle du 12 décembre dernier. Pis, il a misé sur un cavalier perdant ! Ce qui explique que le parti a été totalement déboussolé par les évènements. Avec deux secrétaires généraux éclaboussés successivement durant cette récente période par les scandales de trafic d'influence, le FLN ne pouvait trouver ses repères.

Fui par tous les opportunistes qui l'utilisaient comme tremplin, le vieux parti n'est plus qu'une ombre sur la scène politique nationale. Pouvait-il en rester là, dans un rôle de spectateur des profonds changements politiques en cours dans le pays ? Certainement pas. C'est même une question d'être ou de disparaître. De toute façon, le FLN doit faire peau neuve pour prétendre à jouer un quelconque rôle sur l'échiquier politique de la nouvelle Algérie.

Cela, des militants l'ont compris mieux que ceux qui tentent désespérément de s'accrocher au vieux parti. Et, pour ceux qui plaident pour le changement, il ne s'agit plus de faire dans le mouvement de redressement, comme le parti en a connu tant durant ces dernières années, mais d'une tentative radicale de sauvegarder le parti d'une disparition de la scène nationale.

M. Ali Seddiki, le SG du FLN par intérim, fait face à une colère exprimée par les militants qui veulent balayer la vieille garde et prendre en main le destin du parti. Hier, le SG par intérim et d'autres cadres du parti qui rejoignaient le siège du parti pour tenir une réunion avec les mouhafedhs ont été accueillis par des slogans chers au Hirak, auquel on a même emprunté son caractère « silmiya », et des banderoles portant des écrits hostiles aux cadres dirigeants qu'on a pris soin d'accrocher à la grille de clôture du siège du parti. « Dégagez tous», leur ont signifié de jeunes militants massivement regroupés devant le siège du parti. En un sursaut salutaire, ces jeunes se sont révoltés contre la direction du parti, exigeant ni plus ni moins que la remise des clés de la maison FLN.

C'est la seule issue pour empêcher le parti de sombrer dans le néant.

Reste à savoir si le mouvement aura le souffle long et la détermination nécessaire pour arracher de ses fauteuils un personnel qui a fait ses racines dans le parti.

Car, faut-il le souligner, le FLN en a connu des vents de contestation, voire des tempêtes, qui ont finalement été déviés de leur direction ou affaiblis en bout de course. Bien sûr, la situation n'est plus la même, aujourd'hui il n'y a plus d'orientation qui vient d'en haut et que tous suivaient en rangs disciplinés. Le FLN se meut de ses propres élans, plutôt faibles sans l'appui d'une administration se cherchant une neutralité, une virginité, qui ne s'embarrasserait pas de ce lourd traîneau. Le FLN est bel et bien face à son destin. Saura-t-il accepter les nouvelles règles du jeu politique ? Mieux vaut le faire. Car, toute résistance au changement usera les forces qui lui restent encore en poussant à une désertion massive de ses militants.