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Macron convertit la France à la «realpolitik»

par Kharroubi Habib

Dans le conflit syrien, le président Emmanuel Macron a fait faire un virage à 180 degrés à la position de la France qui a consisté pendant la présidence de François Hollande à prôner la destitution du président syrien Bachar El Assad et à soutenir qu'il est impensable qu'il puisse être considéré comme partie à la solution qui doit mettre fin à ce conflit.

Macron qui en tant que candidat à la présidentielle avait émis des signes qu'il ne partageait pas l'approche hollandienne sur le dossier syrien n'a pas tardé une fois élu à officialiser sa rupture avec celle-ci, en déclarant que lui ne fait pas du départ de Bachar El Assad une condition préalable à l'intervention de la France. Le président français a expliqué que cette rupture qu'il opère ne part pas d'un constat simple mais elle s'impose au motif que la position politique et diplomatique observée depuis presque sept ans par ses prédécesseurs a été sans efficacité. Qu'ont obtenu en effet Sarkozy puis François Hollande en s'entêtant à maintenir la France dans le refus d'inclure le président syrien et son régime à la solution du conflit, sinon à conforter une rébellion armée qui a provoqué un appel d'air que des organisations et groupes armés terroristes ont exploité pour en prendre la direction.

Macron a pris acte de cette situation et fixe pour objectif principal à la diplomatie française et à l'intervention de son pays dans le conflit syrien celui de «l'éradication des terroristes, de tous les groupes terroristes quelles que soient leurs sensibilités». Cette dernière précision sous-entend en creux que la France va mettre fin aux soutiens qu'elle a prodigués à certains d'entre eux au prétexte cyniquement avancé par Laurent Fabius qu'ils feraient du «bon boulot» contre le régime syrien.

Il est incontestable que le virage opéré par Emmanuel Macron à la position française va contribuer à faire bouger les lignes dans le sens de la recherche d'une solution politique négociée au conflit syrien. Ce à quoi l'opposition anti-régime a fait systématiquement obstacle en étant confortée par les puissances qui comme la France sous Hollande se sont ingéniées à poursuivre un agenda voué à faire tomber le régime d'El Assad. Il y contribuera d'autant que ce faisant la France rejoint le camp des acteurs internationaux qui ont pris conscience que la lutte antiterroriste est la priorité et à qu'à ce titre se braquer sur la chute du régime syrien ne peut être la stratégie gagnante dans cette lutte.

Macron qui ambitionne de faire jouer à la France un rôle de puissance écoutée et agissante sur le conflit syrien, l'a dotée sur ce dossier d'une doctrine qui tient compte de la « realpolitik » qui est en l'occurrence qu'elle cesse son hystérique comportement envers un régime dont elle a vainement tenté de provoquer la chute. S'il faut saluer la prise de conscience du président français, il y a néanmoins qu'il n'est pas à oublier que la position de la France a une part de responsabilité dont on ne peut l'exonérer dans le fait que le conflit syrien en est à sa septième année avec pour effroyable bilan près de 400.000 morts, des millions de réfugiés ou déplacés, un pays en ruine et des groupes terroristes dont la neutralisation sera longue à venir à cause de l'armement dont ils disposent grâce à l'aide française et des autres puissances qui comme elle ont fait une fixation sur la destitution d'El Assad et la chute de son régime.