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La reconstruction de la Syrie en débat à Bruxelles

par Kharroubi Habib

Bruxelles abritera les 04 et 05 avril une conférence multilatérale de niveau ministériel sur la Syrie co-organisée et présidée conjointement par l'Union européenne (UE) et l'ONU. Y prendront part les 28 Etats membres de l'UE et des principaux pays impliqués dans la crise comme les Etats-Unis, la Russie et les voisins de la Syrie. La spécificité de cette rencontre est que pour la première fois depuis le début de la crise syrienne il sera internationalement question de la reconstruction du pays alors même que n'a pas encore pris fin la guerre dont il est le théâtre depuis six ans.

Dans l'esprit de ses initiateurs euro-onusiens, la conférence est destinée à arrêter les conditions qui rendront possible la contribution internationale à cette reconstruction dont le coût évalué par les experts se situerait entre 200 et 300 milliards d'euros. La question est de savoir si les parties participantes à la conférence parviendront à s'entendre sur la nature des conditions surtout celles politiques sur lesquelles leurs divergences ont été jusque-là irréconciliables. La plus clivante d'entre celles-ci étant bien entendu le sort qui va être celui du président syrien Bachar El Assad dont certains des Etats participant à la conférence ont fait de son départ du pouvoir un préalable « non négociable » tant pour un éventuel accord de paix que pour leur contribution après cela à la reconstruction de la Syrie. Pour autant, il y a forte chance que la conférence de Bruxelles ne sera pas détournée de son objectif par un affrontement entre partisans et adversaires de cette condition liée au cas de Bachar El Assad.

Heureuse coïncidence, la conférence de Bruxelles se tiendra peu après que l'Amérique, tutelle et chef d'orchestre des anti-régime syrien et de son président, a opéré un changement de cap de son attitude dans l'affaire syrienne en considérant que le départ de celui-ci n'est plus une condition primordiale et qu'il appartient aux Syriens de se prononcer en la matière. L'on voit mal par exemple comment la France qui a été la plus farouche tenante de l'exigence de ce départ pourrait persister à la mettre sur le tapis à Bruxelles alors que douchée par le revirement américain mais soumise à la volonté états-unienne, elle en a opéré elle aussi un dans le même sens.

Le maintien de Bachar El Assad à la tête de la Syrie est désormais une réalité actée pour pratiquement l'ensemble des parties participantes à la conférence de Bruxelles. Que la France le veuille ou non, la communauté internationale fera avec cette réalité d'autant que la reconstruction de la Syrie va mettre en jeu un faramineux pactole dont chaque Etat participant cherchera à en retirer le profit maximum. L'urgence, il est vrai, est pour l'heure de mettre fin à l'abominable conflit armé en Syrie. La France qui s'est distinguée par son acharnement à l'entretenir peut contribuer à le faire cesser pour sinon être absoute de cette responsabilité, du moins démontrer qu'elle a pris conscience de l'énormité des malheurs infligés au peuple syrien dont elle a été complice.