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Retour de manivelle pour la diplomatie marocaine

par Kharroubi Habib

La grande offensive menée tous azimuts par la diplomatie marocaine pour tenter de faire admettre à la communauté internationale l'irréversibilité de l'annexion du Sahara occidental par le Royaume n'a assurément pas eu les résultats escomptés par ses promoteurs. L'inanité de la tentative marocaine s'est au contraire clairement révélée quand : primo, la cour de justice européenne (CJUE) refusant de souscrire à la thèse de l'appartenance au Maroc du territoire sahraoui a rendu un arrêt déclarant celui-ci séparé et distinct du Royaume, ce qui fait obligation aux pays de l'Union de réviser dans ce sens l'accord de coopération qu'ils ont conclu avec ce Royaume, et que secundo le Maroc a réintégré la communauté africaine mais en étant contraint de renoncer à ses exigences premières qui étaient que l'Union africaine cesse de reconnaître le Sahara occidental en tant qu'Etat indépendant et procède à l'exclusion de la RASD de ses rangs.

Ces deux revers subis par la diplomatie marocaine suscitent par enchaînement des prises de position qui confirment que la communauté internationale n'est pas disposée à accepter en tant que fait accompli l'occupation par le Maroc du territoire sahraoui. Prenant en effet acte de l'arrêt rendu par la CJUE, la plupart des pays européens à l'exception notable de la France l'ont considéré exécutoire et s'imposant à eux dans leurs relations avec le Royaume. Même l'Espagne sur laquelle les autorités marocaines ont tenté d'exercer le chantage de l'émigration clandestine massive s'est rangée dans le camp des respectueux de l'Etat de droit en faisant connaître son engagement total à se conformer au verdict de la CJUE. L'autre avanie qui a résulté pour les autorités de Rabat est la condamnation des violations du Maroc dans le Sahara occidental prononcée lundi par le Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine réuni pour examiner où en est la situation dans le dossier sahraoui. Le prononcé de cette condamnation vaut réaffirmation à l'intention du Maroc que l'Union africaine ne lui fera aucune concession sur la question sahraouie au prétexte qu'il est désormais l'un de ses membres. Sa politique du chantage et de la provocation s'étant révélée improductive voire même ayant généré des retours négatifs à coût fort pour elle, la diplomatie marocaine n'a rien trouvé de mieux que de boycotter la réunion du Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine. Ce qui n'est pas pour valoir au Maroc la fin des suspicions qu'a fait naître sa demande d'adhésion à l'Union africaine. Les pays qui y voient au contraire confirmation ne manqueront pas de le mettre au pied du mur en le plaçant devant l'obligation en tant qu'Etat membre de l'Union soit d'en appliquer les résolutions, soit d'afficher son intention d'être considéré en tant que faisant exception à cette règle d'or inscrite dans la charte constitutive de l'organisation. Plus discrète mais néanmoins efficace sans être arrogante et recourant au chantage, la diplomatie du Front Polisario profite des faux pas que commet dans sa suffisance celle de la monarchie alaouite et parvient ainsi à effriter lentement mais sûrement le front des complaisances internationales sur lequel elle s'adosse pour tenter de faire prévaloir la « marocanité » irrévocable du Sahara occidental.