Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Conflit syrien : Brahimi sceptique sur la démarche française

par Kharroubi Habib

Au journaliste de la chaîne française «France 24» qui l'a interviewé sur le conflit syrien et l'a interrogé pour savoir s'il «comprenait» la démarche française visant à saisir la Cour pénale internationale sur les crimes de guerre commis à Alep qui pour Paris sont imputables au régime de Bachar El Assad et à la Russie, le diplomate algérien Lakhdar Brahimi, ancien médiateur des Nations unies et de la Ligue arabe pour la Syrie, a répondu qu'on doit «demander des comptes à tous ceux qui ont contribué à détruire la Syrie».

Brahimi n'est pas allé jusqu'à énumérer à son interviewer les parties qu'englobe son «tous ceux qui ont contribué à détruire la Syrie», mais il a été clair qu'il a visé les Etats occidentaux et de la région qui sont impliqués dans le conflit. Le journaliste de France 24 voulait évidemment l'entendre déclarer qu'il soutient la démarche française incriminant le seul camp du régime et ses alliés. Brahimi s'y est refusé en lui rétorquant que son problème «est que jusqu'à présent pour parler franchement, peut-être brutalement les gens qui s'intéressent à la Syrie ne mettent pas l'intérêt du peuple syrien en premier. L'intérêt du peuple vient dans le meilleur des cas en second lieu». Autant dire que le diplomate algérien lui a fait comprendre que la France n'a pas initié sa démarche en tenant compte d'abord et avant tout de l'intérêt du peuple syrien.

L'ancien médiateur pour la Syrie auquel l'on ne peut faire le reproche d'ignorer les tenants et aboutissants du conflit syrien et les arrière-pensées et calculs des parties qui y sont impliquées, a estimé que «tenir compte» des besoins du peuple syrien apportera des solutions au problème qui se pose. Si, a-t-il ajouté, «l'on se concentrait sur les besoins du peuple syrien, je crois que ça irait mieux pour tout le monde: pour la Russie, les autres pays membres permanents du Conseil de sécurité et les pays de la région». Façon diplomatique de sa part de faire à nouveau entendre que dans le conflit syrien il n'y a pas que la responsabilité du régime et de la Russie qui est en cause.

A la question du «qui bloque» les initiatives et résolutions proposées pour la résolution du conflit syrien que lui a posée le journaliste de France 24, Brahimi a réfuté la suggestion que ce serait la Russie émise par ce dernier sous forme d'interrogation non dénuée d'une prétendue certitude de sa part. Le diplomate algérien a exprimé le sentiment que pour lui l'impression est que le conflit syrien est révélateur d'une certaine «nostalgie pour la guerre froide». Tout en estimant qu'aujourd'hui le changement est nécessaire en Syrie, l'ancien médiateur onusien et de la Ligue arabe n'adhère pas à l'évidence à l'option préconisée par la coalition étrangère anti-régime.

Pour lui, il faut une négociation entre les puissances membres du groupe de contact constitué qui sont des pays qui comptent et en capacité d'arrêter les combats pour «engager des négociations destinées à mettre en forme une autorité provisoire en Syrie dans laquelle Bacha El Assad figurerait en personne ou pas». Ce qui est une autre façon chez lui de tacler les parties qui clament vouloir négocier mais en posant le préalable «non négociable» de l'exclusion du président syrien et de son régime de la négociation sur l'avenir de la Syrie.