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Des apprentis terroristes repérés mais libres d'agir

par Kharroubi Habib

A chaque attentat terroriste en France dont les auteurs s'avèrent être des nationaux acquis à la cause djihado-terroriste, l'on apprend que ces derniers étaient parfaitement connus des services de renseignement et figuraient sur leur fameuse « liste S » comportant les noms des personnes susceptibles de représenter un danger pour la sécurité nationale. Ce qui est le cas du seul terroriste formellement identifié parmi ceux qui ont commis les attentats de Paris de vendredi soir. Dans son cas comme dans celui de ses sinistres prédécesseurs, les services français concernés admettent n'avoir rien ignoré d'eux.

Comment se fait-il que ces services n'ont à chaque fois rien vu venir alors que les concernés étaient censés être sous leur vigilante surveillance, surtout après que celle-ci leur a permis de constater qu'ils se rendaient en des lieux où l'on ne va pas pour faire du tourisme ? Pour leur défense, les services français avancent les « failles » de la législation antiterroriste du pays et l'insuffisance des moyens humains et financiers dont ils disposent pour exercer leur contrôle permanent sur les faits et gestes de tous les inscrits sur leur liste « S ». Après chaque attentat, les autorités dont ces arguments pointent la responsabilité promettent de revoir la politique sécuritaire du pays.

Il nous apparaît dans le cas des djihado-terroristes en question qu'ils ont disparu du radar d'observation des services de renseignement grâce ou à cause de la manipulation politique dont fait l'objet leur mouvance. Pour des raisons qu'explique la position française sur le conflit syrien et plus généralement sur la plupart de ceux qui ont pour théâtre le monde musulman, les autorités de Paris n'ont pas jugé qu'il leur fallait sévir préventivement contre leurs ressortissants pourtant clairement identifiés comme acquis à la cause djihado-terroriste et ayant plus que probablement noué contact à l'extérieur avec les organisations qui la prêchent et la mettent en pratique là où elles sont implantées.

Un ancien officier des services de renseignement français Eric Denece que notre confrère El Watan a interviewé l'a confirmé en affirmant que « nos services n'ont pas reçu d'ordre pour agir contre ces ressortissants français qui sont au sens propre des criminels et des traîtres collaborant avec des ennemis de la France ». Les autorités françaises proclament à tout bout de champ que le terrorisme est l'ennemi premier de leur pays. Leur politique étrangère n'apparaît guère basée sur ce postulat, du moins s'agissant du conflit syrien dans lequel la France ferme les yeux sur les agissements de ses ressortissants appelant au « djihad » dans ce pays ou partis le faire.

Elles les ferment pour ne pas avoir à admettre qu'elles ont sciemment été dans le laxisme intéressé qu'elles ont pensé être de la « haute voltige » qui vaut à la France d'être bien vue de certaines composantes de la nébuleuse djihado-terroriste et surtout de ses riches sponsors aux coffres garnis. Mais comme toujours, il y a des limites à l'ambiguïté, c'est ce que constatent maintenant ces autorités qui ont imprudemment joué avec le feu.