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Tel-Aviv - Ryadh: même ennemi, même combat

par Kharroubi Habib

Israël et l'Arabie Saoudite ne peuvent souscrire à la normalisation des relations entre les Occidentaux et l'Iran qu'a amorcée l'accord-cadre qu'ils ont conclu sur le dossier du nucléaire. Les deux Etats ne reculeront devant rien pour bloquer ce processus. La perspective d'un Etat iranien redevenant «fréquentable» pour la communauté internationale n'est envisageable ni pour Tel-Aviv ni pour Ryadh, car cela signifierait pour Israël et la monarchie saoudite la fin de leur politique faisant de l'Iran la source de la déstabilisation dont le Moyen-Orient est la scène et une menace existentielle pour leur sécurité nationale respective.

Que l'Iran renonce à la production de l'arme atomique n'empêchera pas Tel-Aviv et Ryadh d'agiter «l'épouvantail» du danger qu'il est censé représenter pour la région et pour leurs Etats respectifs. Cette fiction d'un Iran belliciste et expansionniste, Israël et l'Arabie Saoudite font tout pour l'entretenir. Pour Israël, il faut en effet qu'elle perdure pour qu'il puisse toujours se présenter comme un Etat «menacé» dans son existence. Pour l'Etat sioniste, la prétendue menace iranienne est le substitut dans sa propagande à celle qu'il prêtait aux Etats arabes et qu'il ne peut plus agiter tant ces Etats qui ayant implosé, qui s'est inséré dans la «pax» israélienne. Pour l'Arabie Saoudite, il faut de même que la fiction d'un Iran fauteur de trouble dans la région perdure, faute de quoi il y aurait risque pour elle que le bouclier protecteur américain dont bénéficie son régime ne jouerait pas systématiquement en cas de situation pour lui périlleuse interne ou régionale.

Dans son opposition à une normalisation des relations entre l'Iran et l'Occident, Israël rameute derrière lui tout ce qu'il compte d'inconditionnels, au premier rang desquels le Congrès américain et les lobbys sionistes à l'influence déterminante au sein des cercles dirigeants en Amérique et en Europe. L'Arabie Saoudite quant à elle s'active à dresser le monde musulman sunnite contre l'Iran pour l'emmener à joindre ses pressions aux siennes sur les Occidentaux pour les entretenir dans la vision d'un Iran qui quoi qu'il dise ou fasse est et restera dangereux pour la sécurité et la stabilité des Etats de la région.

La connivence devenue véritable alliance entre Israël et l'Arabie Saoudite est patente, les deux suivant la même logique qu'il leur faut avoir un adversaire régional par l'existence duquel faire perdurer leurs statuts, pour le premier d'allié stratégique de l'Occident dans le Moyen-Orient et de «protégé» pour le second de ce même Occident. Vent debout, les deux Etats font feu de tout bois pour faire échouer le rapprochement irano-occidental, quitte à créer une situation qui plongerait la région dans un chaos généralisé, telle que se lancer dans une des aventures militaires qui contraindraient l'Iran à leur répliquer. A se retrouver sans l'alibi d'une puissance régionale aux desseins prétendument agressifs à leur endroit, l'Etat sioniste et la monarchie wahhabite paniquent et ruminent tous les coups fourrés possibles.