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De quelle solidarité ont besoin les Tunisiens ?

par Kharroubi Habib

Une grandiose marche populaire contre le terrorisme s'est déroulée hier dimanche à Tunis. Des dizaines de milliers de citoyennes et citoyens tunisiens y ont pris part en signe de protestation contre le tragique attentat du musée du Bardo qui a coûté la vie à 22 personnes, Tunisiens et touristes étrangers. Pour y clamer également leur détermination à ne pas céder à la peur et à opposer un front uni au fléau terroriste qui cherche à faire avorter leur fragile démocratie qui se met en place.

Les marcheurs tunisiens se sont à coup sûr réjouis de la participation à leur manifestation de nombreuses hautes personnalités étrangères venues témoigner par leur présence de la solidarité de leurs pays respectifs à l'endroit de leur combat. La symbolique de la présence de ces hautes personnalités est incontestablement parlante de la sympathie internationale que suscite la Tunisie engagée dans un processus de démocratisation prometteur et par sa résistance aux extrémistes terroristes qui veulent le faire échouer. Il n'en reste pas moins que cette étape cruciale et décisive pour elle, la Tunisie est en droit d'attendre que la solidarité internationale dont elle a besoin s'exprime autrement que par des gestes symboliques.

Le front intérieur uni que les Tunisiens opposent aux menées des djihado-terroristes dans leur pays a en effet besoin d'être conforté par l'action d'une armée nationale et de forces de sécurité disposant de moyens matériels performants pour assumer leur mission sécuritaire et que l'économie nationale tunisienne renoue avec la croissance barrage aux frustrations susceptibles d'alimenter le recrutement par les courants extrémistes et terroristes. Sur ces deux volets la solidarité internationale tarde à s'exprimer de façon conséquente.

Les quelques aides dont a jusqu'à maintenant bénéficié la Tunisie ne sont pas à hauteur des enjeux des défis auxquels elle est confrontée. Certains partenaires de ce pays tout en « s'extasiant » sur les avancées positives qu'il réalise sur la voie de la démocratie et d'un projet de société moderniste, hésitent ou traînent le pas à lui fournir les aides dont il a besoin pour que sa démarche soit irréversible. Comme s'ils nourrissent le doute sur les capacités du peuple tunisien et de ses dirigeants à assumer ce pari.

Quand on compare les aides internationales qui se sont déversées sur l'Ukraine pour prétendument lui permettre de faire face aux menaces que font planer sur elle la Russie et les séparatistes prorusses, et surtout la célérité avec laquelle elles lui sont octroyées, avec celles que la Tunisie a reçues, il n'y a incontestablement pas « photo ». Beaucoup de promesses sont prodiguées à la Tunisie qui ne se concrétisent pas malgré l'urgence qu'il y a à les mettre à disposition des nouvelles autorités tunisiennes qui de ce fait peinent à réunir les moyens pour entreprendre un plan de redressement du pays couplé à une efficace guerre contre le fléau du terrorisme. Cela au risque de provoquer désillusion et colère au sein d'une population dont la satisfaction des attentes et espérances sociales est sans cesse différée faute de moyens dont l'Etat dispose. Se proclamer « amis » de la Tunisie et de son combat pour la démocratie et la modernité implique de lui manifester une solidarité pratique allant au-delà des gestes symboliques.