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In Salah: durcissement et escalade dans la confrontation

par Kharroubi Habib

De pacifique qu'elle a été depuis son début en janvier dernier, la contestation populaire anti-exploitation du gaz de schiste qui se poursuit à In Salah a depuis samedi tourné à l'épreuve de force entre manifestants et agents de l'ordre public. Des affrontements très violents se sont produits entre eux faisant de nombreux blessés de part et d'autre.

Par solidarité avec les protestataires d'In Salah, des citoyens sont descendus dans la rue à Ouargla et Tamanrasset pour dénoncer la répression dont ils font l'objet. L'on assiste bel et bien à une escalade aux conséquences imprévisibles dans cette affaire de l'exploitation du gaz de schiste. Le premier responsable en est le pouvoir qui en l'occurrence après avoir affirmé une chose et son contraire sur ses intentions en la matière a de toute évidence opté pour ignorer l'opposition populaire qui s'exprime à In Salah contre l'exploitation du gaz de schiste et a apparemment entrepris d'intensifier les opérations de forages de prospection dont les manifestants réclament l'abandon. De quoi évidemment échauffer les esprits parmi les opposants anti-gaz de schiste et donner raison à ceux d'entre eux qui prêchent le recours à une contestation plus radicale et donc plus dure dans son mode opératoire.

Le risque de l'escalade en est que la maîtrise des évènements finisse par échapper à toutes les parties. Que l'on soit pour ou contre l'exploitation du gaz de schiste, il nous faut dénoncer l'engrenage car il mène à une confrontation dans une région du pays sujette à convoitise et menaces extérieures qui ne guettent que le moment propice pour fondre sur elle. Ils ont tort les apprentis sorciers de tout bord, du côté des partisans de l'exploitation du gaz de schiste ou de celui de ses adversaires, qui poussent à la confrontation en essayant un passage en force pour les premiers et en abandonnant la protesta pacifique pour les seconds. Ils seront tous perdants et le pays avec si la confrontation débouchait sur le chaos, y compris l'opposition politique au régime dont certains acteurs jettent inconsidérablement de l'huile sur le feu croyant qu'ils tireront bénéfice s'il se produisait une telle situation. Pourquoi avant qu'il ne soit trop tard le pouvoir ne décréterait-il pas un moratoire sur cette question controversée de l'exploitation de gaz à la fois pour apaiser le climat et pour organiser un débat entre spécialistes nationaux pro et anti-exploitation du gaz du schiste qui permettrait aux citoyens de se faire une conviction en la matière raisonnée, pour ne plus être manipulables par les activistes des deux bords aux calculs n'ayant rien à voir avec cette question du gaz de schiste ?

Les autorités clament avoir pris toutes les précautions qui permettraient une exploitation du gaz de schiste sans risques pour les populations et l'environnement que les manifestants disent craindre. Mais leur communication sur le sujet est si calamiteuse qu'elle a tourné au détriment de leur thèse. Elles aggravent leur cas et le danger pour le pays en laissant la situation se pourrir. Elles pensent peut-être parvenir à gérer la contestation si comme cela en a l'air elle emprunte le chemin de la violence destructrice, dont elles savent exploiter l'effet réprobateur qu'elle suscite au sein de l'opinion publique. Dans ce cas, le pari est aussi insane qu'irresponsable au regard de la stabilité et de l'unité nationale.