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Saïdani douche l'enthousiasme du FFS

par Kharroubi Habib

Dans sa déclaration lors de la rencontre FLN-FFS, le secrétaire général du premier a posé le préalable à l'éventuelle participation de sa formation à la conférence nationale sur le consensus national que le second tente de mettre sur pied qu'il ne soit pas question que celle-ci aborde la question de la légitimité du chef de l'Etat dont il a prétendu qu'elle est « indiscutable » car le peuple en a « décidé ».

La sortie du patron du FLN a dû refroidir les représentants du Front des forces socialistes dont le projet de conférence nationale énonce le principe que les parties qui y prendront part devraient accepter de ne poser aucun préalable et seront libres d'aborder tout problème et question qu'ils estimeront en rapport avec son objectif qui est la reconstruction du consensus national. Ils ont dû mesurer à l'écoute de Saïdani qu'il va leur être extrêmement difficile pour ne pas dire totalement impossible de rallier à leur démarche les formations de l'opposition ayant fait justement de la contestation de la légitimité de Bouteflika le socle du front qu'elles ont constitué.

L'on voit mal en effet qu'au cas où éventuellement ces formations participent à la conférence proposée par le FFS elles vont taire la question de l'illégitimité du pouvoir en place rendue pour elles tout aussi « indiscutable » car devenue évidente par la fraude électorale dont aurait été entachée l'élection présidentielle d'avril 2014. Il y a fort à penser que Amar Saïdani a assené le préalable dans l'espoir que s'en prévalant ces formations opposent une fin de non-recevoir à la démarche du vieux parti de l'opposition.

Il ne faut pas en effet se leurrer, les gens du pouvoir et leurs appareils partisans satellites ne veulent d'aucune conférence ou dialogue ayant le changement du système politique. S'ils font mine d'être intéressés par l'initiative du FFS c'est uniquement pour braquer contre elle les tenants de l'opposition. Le FLN, le RND et après eux très certainement d'autres partis du pouvoir n'ont que ce calcul en se montrant disposés à prendre part au cycle de consultations entamé par la formation d'Aït Ahmed. Ils n'ont pas rejeté catégoriquement l'initiative du FFS parce que celui-ci ne l'a pas présentée comme destinée à mettre le pouvoir au pied du mur et encore moins à le contraindre à « dégager » comme c'est l'intention avouée de celle à laquelle s'en tiennent les formations et personnalités politiques regroupées dans la CNLTD.

Elle n'en a pas moins « l'odeur du soufre » pour les gens du pouvoir car elle vise tout autant à arriver à ce changement de système et de régime à la perspective duquel ils sont fondamentalement et irrévocablement réfractaires. En faisant mine d'ouverture et qui plus est en direction du plus ancien parti d'opposition au crédit politique indubitable, les satellites partisans du pouvoir escomptent que leur attitude confortera l'idée dans l'opinion publique que ce n'est pas le camp du pouvoir qui ne veut pas d'un dialogue politique sur la reconstruction du consensus national, mais l'opposition que la sortie de Saïdani va probablement déterminer à décliner d'être partie prenante de la démarche du FFS.

Amar Saïdani a certes encensé le parti d'Aït Ahmed et louangé sans retenue son fondateur, mais dans le même temps il a copieusement savonné le sol sous les pas de la direction de ce parti qui a fait le pari grandiose d'arriver à convaincre les Algériens et leur classe politique qu'il est de l'intérêt vital pour le pays et pour eux qu'ils résolvent la crise nationale par la voie du dialogue et du consensus. Il n'y parviendra peut-être pas mais c'est déjà son mérite de prôner cette option.