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DES GENERAUX SANS ARMEES

par Abdou BENABBOU

La volonté affirmée de battre le rappel des compétences algériennes vivant à l'étranger est au premier abord séduisante. Feu Boudiaf s'était armé de cette option censée être profitable pour le pays, mais toutes les invitations adressées à quelques personnalités se sont avérées un coup d'épée dans l'eau. La nature complexe des hommes adhère à bien d'autres choses qu'à un patriotisme en surface et quel que soit le degré d'engagement de chacun, nul ne peut se passer de quelques attributs légitimes nécessaires pour se conformer à sa stature.

A observer la déperdition du savoir-faire local et la prise en charge en Algérie des compétences étrangères dans de nombreux domaines, on ne peut qu'être interloqué par un paradoxe magistral qui fait par exemple d'un médecin algérien un palliatif dérisoire alors que son homologue cubain est rémunéré à 5000 euros par mois par l'Algérie. Au nom d'une coopération en pointillé l'étranger bénéficie d'une largesse et des commodités outrancières alors que le praticien algérien est inscrit dans le registre du faire-valoir comme si le devoir était une pénitence obligatoire qui à la limite n'offre que le loisir d'étaler une pédanterie.

De l'aveu du président de la République, quelques sommités algériennes installées à l'étranger se sont dites engagées à mettre leurs expériences à la disposition du pays. Si leur disposition serait bénéfique, l'anoblissement du savoir mérite un engagement autrement plus conséquent de l'Etat pour que l'élite locale d'abord sente qu'elle est l'objet d'une grande attention où un ensemble d'ingrédients matériels est synonyme d'une forte considération. Sinon les éminents chercheurs et savants algériens immigrés ne deviendraient avec leur retour que de simples généraux sans armées. Dans bien des cas, leur exil est dû à la désertisation des intermédiaires dans une société où l'incompétence et la gabegie ont déraciné tout ce qui a trait à l'intelligence et au comportement raisonné.

Le rappel des compétences algériennes de l'étranger doit s'accompagner en parallèle de la germination d'un nouvel esprit pour faire sortir de l'ombre tous ceux qui ont une richesse à apporter.