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DES RATES JUSQU'A LA LIE

par Abdou BENABBOU

Faire la fine bouche et la moue est de circonstance à l'annonce de la mise à disposition de centaines de locaux commerciaux aux jeunes chômeurs. A défaut d'un savoir-faire criard et généralisé, ils auront donc l'unique loisir d'y vendre des patates, des bidons en plastique et du cosmétique ou, à la limite, de s'initier au bricolage de la téléphonie. A croire qu'à travers cette énième décision gouvernementale nous avons des armadas de petits savants ou de génies commerciaux qui viendront donner au monde du travail et du commerce un régénérateur souffle salvateur. Le drame est que l'on se soit contenté pour se maintenir au pouvoir d'obliger des générations entières de se limiter à une éducation et une école qui ne s'en tiennent qu'à l'obligation de se mettre au garde-à-vous et à ânonner une religieuse poésie dont on ne pipe mot de sa sacralité.

Malheureusement toutes les maladroites obligeances éducatives et de formations imposées jusqu'ici sont aux antipodes de la réalité au moment où il faut s'armer d'un profil bas pour dénicher un bon plombier ou un acceptable menuisier et pour constater que cette denrée rarissime gagne mieux sa vie que le chirurgien des plus chevronnés.

C'est encore la mime de l'expérience tatillonne de l'ANSEJ qui se renouvelle où des milliers de milliards ont été engloutis sans résultats probants car, dans une fuite en avant, on a fait semblant de croire que l'activité économique était un jeu de marionnettes et de poupées. Au lieu d'être rationnelle au bénéfice de la jeunesse algérienne, la démarche ne reposait que sur une maladroite tentative de saupoudrage pour une aléatoire continence sociale. Sans doute pensait-on que le logiciel des compétences et des âmes bien armées était le grand ennemi des passe-droits légalisés.

Ainsi la charrue mise avant les bœufs va offrir un autre magouillage comme dans l'ensemble des autres secteurs où la culture du troc des infantiles procédés n'offre en définitive que l'accélération de la descente aux enfers d'une jeunesse qui n'en finit pas de boire ses ratés jusqu'à la lie, jusqu'à confiner son existence avec celle des zombies.