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Maintenir l'espoir

par Mahdi Boukhalfa

Les «warnings» sur de difficiles prochaines années qui attendent les Algériens deviennent de plus en plus insistants. Autant sur le plan politique avec l'attentisme ambiant, et en particulier le flou qui entoure toujours la prochaine élection présidentielle, que sur le plan économique avec des pronostics guère rassurants sur la capacité du pays à passer sans encombre ni trop de dommages les trois prochaines années. C'est un fait que depuis la fin de l'année dernière les annonces pessimistes sur la capacité de l'Algérie à passer ce difficile cap de grand stress économique ne font qu'assombrir le tableau de bord de l'Algérie.

Avec le recours sans modération à la planche à billets pour irriguer certains secteurs publics névralgiques, le gouvernement, s'il est pris au piège de la facilité, n'a pas à sa décharge de grands choix autres que celui d'aller à l'endettement extérieur pour se voir proposer des solutions absolument antisociales. Mais, au change, il gagnerait, car si cette transition sera difficile après le passage par les fourches caudines du FMI et des conseils des institutions de Bretton Woods pour réformer de fond en comble l'économie nationale et ses fondamentaux, elle permettra au moins d'éviter la crise et la faillite financières, une dure crise sociale et le retour fatalement à l'endettement extérieur, forcé à ce moment. Là n'est pas le souhait des autorités publiques, mais, dans le même temps, il n'y a pas de gros efforts d'assainissement des fondamentaux, le retour à l'orthodoxie financière et la surveillance comme le lait sur le feu de l'évolution de l'inflation, des déficits budgétaires et de la balance des paiements.

Le seul potentiel dont le gouvernement dépend pour réorienter ou du moins peser sur le cours des événements économiques du pays reste le pétrole. Mais, là, il y a un problème de taille, car non seulement l'Algérie n'est pas un gros producteur de pétrole, tout juste 1,2 à 1,5 mbj, mais surtout les cours de l'or noir dépendent de l'évolution globale de l'économie mondiale. Et comme actuellement il y a des signes de ralentissement des principales économies mondiales, comme la Chine, l'UE et les Etats-Unis dans une moindre mesure, il est logique de croire que l'année 2019 sera cruciale quant au rétablissement ou la détérioration des termes financiers de l'économie algérienne. Sur l'autre rive, celle politique, il n'y a pas également une éclaircie qui pourrait au moins rassurer quant à la direction que va prendre le pays pour les cinq prochaines années. L'élection présidentielle d'avril prochain devient de plus en plus floue et le silence actuel des partis de la majorité ne contribue en aucune manière à rendre moins préoccupants les prochains moins. Et encore, si l'opposition ou une infime partie de cette opposition intervient dans un débat creux quant à cette présidentielle, elle le fait pour inquiéter encore plus les électeurs sur l'avenir qui les attend.

Le président du MSP, après avoir proposé le report de cette présidentielle, revient avec de nouveaux présages, sombres, et parle de «crise sans précédent à partir de fin 2019'' qui attend le pays et les Algériens. Il pronostique ainsi qu'«à partir de fin 2019, jusqu'à 2022, nous allons connaître des années de vaches maigres, sans précédent. Elles seront difficiles pour l'Algérie et le simple citoyen en ressentira le fardeau plus que d'autres». Ce «warning» de Makri n'est pas le bienvenu, car non seulement il contribue à assombrir une situation déjà passablement compliquée, à tous les niveaux, mais achève de détruire le peu d'espoir qu'il y avait à passer une année 2019 relativement à l'abri d'une quelconque crise systémique. Et là, l'appel de Ali Benflis pour la tenue dans les délais de la présidentielle d'avril prochain sonne comme une attente citoyenne pour que le pays et ses institutions, en dépit des oppositions politiques bien compréhensibles, soient rassurés. Un appel qui participe de la plus simple des manières à maintenir l'espoir et non à créer un dangereux climat anxiogène.