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Mettre fin au tout pétrole

par Mahdi Boukhalfa

Le cours de l'or noir sera toujours d'actualité et une donnée importante pour le gouvernement, pris en tenailles entre l'organisation de la prochaine élection présidentielle et le maintien à flot des finances du pays. Plus que le respect de l'agenda électoral, dont il n'est qu'un exécutant, le gouvernement actuellement dirigé par le SG du RND a une feuille de route simple: appliquer à la lettre la loi de finances 2019, sans écarts et surveiller comme le lait sur le feu les dépenses publiques. Il faudra, cette année plus que les précédentes, que le gouvernement soit vraiment près de ses sous, car les contingences économiques internationales actuelles et à venir peuvent basculer vers le pire à tout moment avec ces annonces d'un brusque ralentissement de l'économie mondiale.

L'économie chinoise, la plus menacée par un ralentissement économique, est celle qui affole les compteurs avec une importante demande en pétrole pour faire tourner ses millions d'usines. Or, le bras de fer avec les Etats-Unis sur les taxes et les droits douaniers peut donner un coup de frein à la formidable demande de pétrole et de gaz de la Chine, ce qui va provoquer un brusque et rapide tassement de la demande mondiale et, fatalement, un effritement des cours de pétrole. La Chine, en 2018, est devenue, selon l'AIE, le premier importateur mondial de pétrole, passant devant les Etats-Unis. Or, en 2018, l'économie chinoise a connu un sérieux essoufflement avec un ralentissement des activités manufacturières. Résultat direct: le brut est passé des 60-65 dollars au début de l'automne à 50-55 dollars en fin d'année.

Des données potentiellement déprimantes pour l'économie nationale qui devraient par ailleurs inciter le gouvernement à la prudence pour au moins les trois premiers mois de l'année. Les réserves en devises sont à moins de 90 milliards de dollars, le déficit commercial est encore de plus de 10 milliards de dollars et la croissance n'arrive pas à se confirmer, avec une baisse généralisée des autres indicateurs et des hausses du chômage et de l'inflation. Le recours à la planche à billets qui a permis de passer l'année 2018 n'est pas une solution, ni un ersatz à une situation économique et financière catastrophique. Sinon comment interpréter que le recours au financement non conventionnel, parti pour une période limitée de trois à cinq ans, est en passe de devenir un outil de fabrication de monnaie virtuelle qui maintient certes une fragile paix sociale, mais déstabilise et détruit complètement les fondamentaux de l'économie nationale ?

En clair, l'économie algérienne, hormis les hydrocarbures, ne produit pas assez de valeur ajoutée pour la mettre sur le marché international, améliorer ses recettes autres que du secteur des hydrocarbures. A cette équation de l'appauvrissement tendanciel de l'Algérie, même si son endettement externe est dérisoire, le gouvernement, en dépit des annonces triomphalistes quant à la reprise des exportations hors hydrocarbures, ne semble pas avoir des réponses, encre moins des solutions urgentes pour sortir de cette démentielle impasse économique et financière. Faut-il incriminer cette coupable addiction au tout pétrole, aux solutions économiques de facilité, ou l'incapacité des gouvernements successifs depuis plus de 50 ans à inventer des itinéraires autres que ceux qui mènent à la dépendance d'une ressource de toute façon tarissable ? Avec l'incertitude qui plane sur la présidentielle, il y a également et surtout les grandes hésitations quant à la mise en place d'une politique économique réaliste qui ne dépend pas du pétrole, mais de toutes les potentialités du pays.