Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Echec consommé, à quand l'ardoise ?

par Moncef Wafi

Ce n'est qu'aujourd'hui que l'Algérie se rend compte qu'elle fait complètement fausse route concernant l'activité de montage de véhicules. Si «mieux vaut tard que jamais», il n'en demeure pas moins qu'il faut rendre compte de ce gaspillage d'argent et de temps. Qui est responsable de cette situation et pourquoi en est-on arrivé là ? Lorsque le nouveau ministre de l'Industrie et des Mines reconnaît finalement que ce qu'on nous présentait comme une révolution de la filière automobile n'est qu'une forme d'«importation déguisée», on se demande alors comment a-t-on laissé faire ça. Qui va être comptable de cette dilapidation de l'argent public alors que toutes les voix expertes avaient averti de l'échec de ces unités de montage ?

Le scandale des usines de Relizane et Tiaret ne sont que l'illustration caricaturale de cette gabegie avec des voitures importées clés en main, sans les roues qu'on monte en se cachant derrière les concepts du SKD et du CKD. Si le ministre appelle à une révision de la règlementation de cette activité, encore une autre, il ne porte aucun doigt accusateur contre les gestionnaires du secteur qui ont failli sur toute la ligne. Il ne fait aucun doute que cette absence de comptabilité contribue à renforcer ce sentiment d'impunité de hauts responsables qui ne rendent pas de compte sur leur management. Comment peut-on effacer trois années de la filière sans au moins comprendre les raisons de cet échec retentissant ? Pourquoi Sellal et Bouchouareb se sont-ils entêtés à nous vendre une idée pourrie, de l'avis de tout le monde ?

Temps et argent ont été dilapidés, poussant les Algériens à se rabattre sur les voitures d'occasion, privatisant un secteur entier au profit de quelques nantis et balisant les cahiers des charges en établissant une réglementation sur mesure. C'est vrai ce que dit le ministre lorsqu'il évoque «un taux d'intégration national qui n'a pas atteint l'objectif escompté», un euphémisme si cela se trouve, en soulignant le prix exorbitant des véhicules par rapport aux années précédentes et en reconnaissant que sur le plan de l'embauche, ce n'était pas l'idéal.

L'Algérie, à travers cette politique de montage, a fini par déstructurer un secteur d'activité et à jeter à la rue des milliers de travailleurs. Le pays a créé des super-concessionnaires, leur offrant toutes les facilités (foncier et prêt bancaire) et leur assurant de vendre leurs voitures en cadenassant le marché. L'Algérien n'avait plus le choix : ou acheter cher et attendre ou se rabattre sur l'occase où là encore les prix ont augmenté. Qui devra donc régler l'ardoise ? Nous, certainement !