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De l'égalité des chances devant l'école

par Mahdi Boukhalfa

Le Bac 2016 aura été sans commune mesure avec les précédentes éditions de ce sésame pour l'entrée à l'université dans le système éducationnel adopté par les pays francophones, excepté le Canada. Il aura surtout montré une incapacité inquiétante du ministère, puis du gouvernement à réagir rapidement et efficacement à un phénomène, la fraude, somme toute gérable dans des proportions raisonnables.

On pourra épiloguer sur le fait que la fraude a été massive, organisée et orchestrée vraisemblablement de l'intérieur même des fortifications des institutions chargées de cet examen. Pour autant, aller jusqu'à fermer l'Internet pour empêcher un autre scénario de fraude pour la session partielle qui a commencé dimanche, résume tout le désarroi dans lequel se trouvent les responsables du ministère, mais également le gouvernement qui a approuvé que la solution excessive à l'extrême et qui a été largement commentée par la presse étrangère, y compris les lointains médias sud-américains, soit prise. Moment de grand stress gouvernemental ? De panique devant une menace réelle sur le baccalauréat, un pilier de l'enseignement national, ou simple manque de sang-froid devant une situation inédite ?

Le fait est que les autorités algériennes, pour sauvegarder une crédibilité largement entamée de l'un des plus importants examens du cursus scolaire adopté par notre pays, sont allées jusqu'à couper le robinet de l'Internet dimanche, 1er jour du bac partiel. Causant en même temps des dégâts encore plus graves à la gouvernance locale, du fonctionnement des banques, des institutions sensibles de l'Etat, aux établissements publics et groupes industriels, en passant par la chaîne des services, dont les transports aériens.

Pour autant, l'une des données fondamentales de cette situation à la limite terrifiante, même si quelque part il y a eu vraiment une menace et une attaque que l'enquête des services de sécurité devra révéler et rendre publique, est que le ministère de l'Education nationale a été vraiment dépassé et n'a pas su gérer dès le début ce dérapage. Pour le reste, c'est-à-dire l'essentiel dont on parle peu, il s'agit d'un terrible coup du sort pour ces candidats qui ont trimé une année durant pour se présenter dans les meilleures conditions à cet examen et sauter cette barrière du bac. De misérables tricheurs cybernétiques sont passés par là, avec l'utilisation d'un « cheval de Troie » bien particulier.

En définitive, l'ampleur de ce scandale, dont le coût financier et humain doit impérativement être rendu public par le ministère de l'Education, sa portée sociologique sur les Algériens, ses effets anthropologiques sur le système éducatif national et ses incidences politiques sur le gouvernement marquent bien la fin d'une époque. Celle d'un examen de fin de cycle pour l'entrée à l'université basé sur un système scolaire à réformer au plus vite, avec le retour aux vraies valeurs de l'éducation basées sur la méritocratie et l'égalité des chances devant l'école.