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Levée de boucliers

par Moncef Wafi

Malgré le silence assourdissant de la classe politique, la décision phare de la dernière tripartite de supprimer la retraite anticipée connaît ses premières contestations. Si, au lendemain de l'annonce de Sellal, les avis des syndicats autonomes étaient mitigés, l'UGTA étant la première à cautionner la mesure gouvernementale, le monde du travail commence à s'organiser. Et symboliquement les premières actions concrètes sont venues de Rouiba.

Les travailleurs de la SNVI dénoncent, comme il fallait s'attendre, un recul sur un des acquis des salariés algériens rejetant catégoriquement la fixation de l'âge de la retraite à 60 ans. Il n'est pas une surprise que la contestation démarre encore une fois de plus de la zone industrielle de Rouiba, où la base syndicale est puissante. Historiquement, les événements du 5 Octobre 1988 ont pris naissance à partir de la contestation ouvrière et le pouls de Rouiba est sérieusement pris en compte par les pouvoirs publics qui doivent certainement se douter qu'un vaste mouvement de contestation allait suivre l'abrogation de l'ordonnance 97-13. En effet, il est plus que probable que la zone de mécontentement s'élargisse à d'autres secteurs et que la contestation gagne d'autres syndicats déjà courroucés par leur mise à l'écart des tripartites.

Cette mesure impopulaire mais salvatrice pour le système de retraite nationale, selon le gouvernement, rencontre d'autres détracteurs au sein des syndicats autonomes essentiellement ceux de l'éducation nationale. Les présidents des syndicats sont unanimes à reconnaître le cachet particulier de leur secteur et affirment qu'obliger un enseignant à travailler jusqu'à ses 60 ans est contreproductif, lésant l'élève en premier. Pour eux, la retraite anticipée est un droit et ce n'est pas aux travailleurs de payer le manque à gagner de la Caisse de retraite minée par les politiques infructueuses du gouvernement.

Si pour le moment la contestation est limitée par les périodes de congé, elle risque de prendre une autre tournure si d'aventure les syndicats prennent en otage la correction des épreuves du bac pour forcer la main au gouvernement dans cette histoire des retraites anticipées. Ce Ramadhan risque d'être encore plus chaud qu'il ne l'est pour peu que le monde du travail ne réagisse violemment et décide d'envahir la rue dans des manifestations de démonstration de force. L'UGTA, qui a perdu toute crédibilité à force de compromission avec le gouvernement et le patronat, n'aura certainement plus son mot à dire.