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Entre «acceptable» et «décevant»

par M. Saadoune

« Acceptable». Les responsables d'Alnfat ont trouvé le mot le moins compromettant pour parler des résultats du 4e appel d'offres national et international dans le secteur pétro-gazier alors que l'écart entre les 31 périmètres proposés et les 4 attribués saute aux yeux. Certains pensent, sans le dire ouvertement, qu'il s'agit d'un échec et que les efforts faits dans le «lifting» de la loi sur les hydrocarbures n'ont pas amélioré l'attractivité de l'amont pétro-gazier du pays. Les offres ne tombant pas à la dernière minute, il ne faut pas chercher d'effet Gourdel sur ce manque d'engouement des opérateurs étrangers. Sur le registre de la sécurité, l'attaque de Tiguentourine de 2013 était plus à craindre en termes d'impact. Or, les efforts de l'Algérie pour sécuriser davantage ses bases pétro-gazières ont reçu une approbation claire avec la décision de Statoil et de BP de faire revenir leur personnel sur la base de Tiguentourine. D'ailleurs, l'un des aspects les plus positifs -peut-être le rare- est de constater que le Norvégien Statoil fait partie d'un consortium (Statoil-Stigma-Schell) qui a obtenu un des quatre périmètres. Le Norvégien, très à cheval sur les questions de sécurité au point de diligenter une enquête indépendante sur l'attaque de Tiguentourine et de créer une structure en charge de la sécurité totalement autonomisée de la gestion économique et financière, envoie un message rassurant et positif en restant impliqué en Algérie. Cette présence de Statoil, en raison même des recommandations sécuritaires strictes que le Norvégien s'est imposées, est rassurante. Elle relativise cependant l'explication du manque d'engouement des entreprises étrangères par les risques liés à la sécurité. Un ancien PDG de Sonatrach, Nazim Zouiouèche, n'a pas fait dans la langue de bois au sujet de la lecture à faire du résultat du 4e appel à la concurrence dans le secteur pétro-gazier. Dans un entretien à Maghreb Emergent, il évoque un «résultat peu brillant, voire triste» et en tout cas «décevant». Sur les quatre périmètres attribués, il y avait une offre unique, la concurrence n'a existé que pour le périmètre de Boughzoul entre Repsol/Shell et Eni. Pas de nouveaux arrivants, non plus, ce sont les «habitués» qui ont fait des offres. Le bilan est plutôt terne pour un appel d'offres qui était, qu'on le veuille ou non, le vrai «test» de la nouvelle loi sur les hydrocarbures concoctée sous la houlette de Youcef Yousfi. Zouiouèche pointe un problème de management et de capacités à répondre de manière précise et claire aux grandes multinationales que l'on souhaite amener à investir. Elles ont besoin surtout, dit-il, d'une «stabilité institutionnelle». Et dans ce domaine, les péripéties de Sonatrach, les mystères qui entourent le limogeage de Zerguine (certaines sources affirment qu'il serait l'effet d'une interférence après une décision prise par l'ancien PDG à l'encontre d'un dirigeant d'une des filiales de Sonatrach) l'illustrent parfaitement. Quand l'acteur principal du secteur des hydrocarbures -et c'est Sonatrach, pas Alnaft- a des problèmes de gouvernance, il ne faut pas s'attendre à ce que des opérateurs étrangers, au demeurant très bien informés, courent derrière les appels nationaux. Les experts relèvent par ailleurs que les multinationales n'ont pas manifesté d'intérêt pour le gaz de schiste. Ils ont des explications «techniques» sur l'absence de maturation du domaine des hydrocarbures non conventionnels en Algérie même si le «potentiel» existe. Mais au-delà de ces constats techniques, il faut bien prendre acte du fait que le gaz de schiste n'est pas, contrairement à ce que le discours officiel suggère, la panacée.