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Huit ans après?

par Moncef Wafi

Huit ans après l'Accord d'Alger, signé en juillet 2006 dans la capitale algérienne entre l'Alliance démocratique du 23 mai pour le changement, représentant les Touaregs, et le gouvernement central de Bamako, le Mali renoue de nouveau avec le dialogue inclusif inter-malien. Ces accords reconnaissaient essentiellement, rappelons-le, l'intégrité du territoire malien, première exigence de Bamako et précisent le contour des avancées pour le développement de la région du Nord-Mali. Pourtant, force est de constater qu'après huit ans, le Mali en est au même point de départ, avec les mêmes exigences et la même plateforme revendicatrice. Le pays a depuis connu une période trouble avec l'entrée en scène des groupes djihadistes et l'intervention militaire française dans la région. Depuis hier, donc, le dialogue inter-malien a été lancé à Alger en présence de toutes les parties influentes qui peuvent peser dans le dossier.

Cette phase finale est la résultante d'un long processus de normalisation initié sous l'égide médiatrice d'Alger qui a déployé tous ses efforts diplomatiques pour, dans un premier temps, lancer les jalons du dialogue inter-malien en arrachant aux différentes factions armées au Nord-Mali une convergence des positions par rapport à leurs propres conflits et en direction de Bamako. Autour de la table des négociations, outre l'Union africaine et la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest ainsi que l'Union européenne, le Niger, la France et le Nigeria, on notera la présence d'une forte délégation du gouvernement malien en face des leaders des six mouvements politico-militaires du nord du Mali. L'enjeu étant de trouver la voie d'une paix durable qui puisse résister aux changements des hommes et des systèmes. Mais pour arriver à ce début de sortie de crise, il aura fallu tout le poids persuasif de la diplomatie algérienne pour réunir des parties en conflit armé et trouver un minimum convergent pour décider tout le monde à donner une nouvelle chance à la paix au Mali.

Pour rappel, la «Déclaration d'Alger» suivie de la signature d'une plateforme préliminaire, sous les auspices d'Alger, a scellé l'œuvre de rapprochement des points de vue et clarification des positions des mouvements dans le nord du Mali. Le document du 9 juin ou la «Déclaration d'Alger» a permis d'abord de trouver un consensus entre le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), le Mouvement arabe de l'Azawad (MAA) et le Haut conseil pour l'unité de l'Azawad (HCUA), signataires de l'accord de cessez-le-feu du 23 mai 2014, dont les relations étaient pour le moins mouvementées. Quant à la plateforme signée par les représentants du MAA, de la Coordination pour le peuple de l'Azawad (CPA) et de la Coordination des mouvements et Fronts patriotiques de résistance (CM-FPR), elle reconnaît «l'intégrité territoriale et l'unité nationale du Mali», l'une des exigences de Bamako pour dialoguer avec les groupes armés touaregs du Nord, mais également, selon les signataires, une garantie d'une prise en charge des revendications légitimes des Touaregs maliens.

C'est dire le chemin parcouru pour que le Mali renoue avec un début de pacification, une priorité pour l'Algérie afin de sécuriser une partie de ses frontières sud. Alger, qui n'a jamais cessé d'appeler au dialogue inter-malien, avant même l'opération militaire française «Serval», est consciente des enjeux sécuritaires qui pèsent sur son territoire et l'épisode du 14 août dernier à Bordj Badji Mokhtar illustre parfaitement la contamination de la région par les dissensions armées qui existent entre les Touaregs au nord du Mali. On se rappelle qu'un conflit a éclaté entre Arabes Barabiches et Touaregs Idnanes à Bordj Badji Mokhtar et des hommes du MAA et de MNLA ont pris part à ces affrontements armés avec leur lot de tués. Quatre jours plus tard, le MNLA, le HCUA et le MAA condamnent officiellement ces violences, mais le mal était déjà fait.