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Quel
rôle doivent jouer les médias pour la préservation de
l'environnement ? Comment traiter les questions environnementales? Quelles
sont les solutions proposées ? Des questions qui étaient au centre des débats
du symposium sur « Médias et environnement en Méditerranée », organisé les 4 et
5 mars au Yacht Club de Monaco par l'Union internationale de la presse
francophone (UPF).
Son secrétaire général, Jean Kouchner nous parle dans cet entretien de la situation de la presse dans les pays francophone, du poids des lobbies sur les médias et de la nouvelle section UPF qui sera créée en Algérie. Le Quotidien d'Oran: Avant d'aborder avec vous les questions sur les médias et environnement, thème du symposium organisé à Monaco, pouvez-vous nous parler de l'UPF et les actions qu'elle compte entreprendre pour le développement de la presse francophone ? Jean Kouchner: L'Union internationale de la presse francophone est une organisation très ancienne qui a connu une nouvelle jeunesse depuis des années. Elle a été rénovée et est représentative des questions qui se posent sur les journalistes et les médias dans l'espace francophone. C'est une organisation internationale comme son nom l'indique, organisée en sections nationales dans une quarantaine de pays francophones. On a déjà des représentants dans 90 pays et des sections constituées dans une quarantaine d'autres qui se préoccupent de répondre aux interrogations que les journalistes et les médias peuvent avoir, de défendre la liberté de la presse et de promouvoir et d'essayer de développer les médias francophones partout où ils sont. Q.O.: Est-ce cette organisation s'attribue le rôle de syndicat ? J.K: Non,ce n'est pas un rôle de syndicat qu'elle s'attribue. Les syndicats font leur travail. Ils défendent la profession et les problèmes qui se posent à eux, je dirais, qui sont de caractère corporatif pour la profession. Ce qui est nécessaire et indispensable. L'UPF ne se préoccupe pas des conditions de travail des journalistes ou des salaires. Ce n'est pas l'essentiel de nos interrogations. Notre préoccupation est comment faire pour que se développent les médias francophones partout dans le monde, avec quels moyens travaillent les journalistes pour assurer une mission indispensable et bien informer les citoyens. Q.O.: L'UPF aide, donc, les médias à se développer dans les pays francophones? J.K.: Elle les aide par une réflexion de fond sur les conditions de leur développement et sur les interrogations qu'eux-mêmes peuvent avoir. Cette présence ici à Monaco des médias pour discuter de la question de l'environnement, c'est une réponse à des préoccupations qui étaient exprimées par la section monégasque qui s'interrogeait comment les journalistes traitent les questions environnementales dans le bassin méditerranéen, une mer fermée, et le risque pour l'environnement. On a décidé de répondre à cette question en regroupant tous nos représentants du bassin méditerranéen pour réfléchir ensemble comment ils travaillent, quels problèmes se posent à eux, quelle réponse ils apportent. Q.O.: Un aperçu sur la situation de la presse dans les pays francophone ? J.K.: C'est très variable. Dans certains pays, la presse francophone est en pointe et elle se développe de façon intéressante et dans d'autres pays, elle connaît des difficultés, soit parce que la francophonie est récusée ou qu'elle vient d'arriver dans certains pays, soit parce qu'il y a une crise réelle des médias et notamment des médias écrits dans des régions où l'internet vient gêner le développement des médias écrits. Donc, c'est très variable d'un pays à l'autre. Q.O.: Pourquoi ce choix du thème « Médias et environnement en Méditerranée » ? J.K.: C'est une préoccupation exprimée par les adhérents. L'environnement prend de plus en plus d'importance dans le monde. Le réchauffement climatique se traduit par des interrogations sur l'avenir des économies et de la vie des hommes. On n'a pas d'autres terres ni une terre de remplacement. Donc cette question doit être, de façon indispensable, traitée dans les médias parce qu'il faut informer les citoyens et il faut que ces citoyens soient partie prenante dans cette interrogation sur l'environnement et aussi informer sur les atteintes à l'environnement qui peuvent y avoir ici et là. Sur la politique des Etats, sur l'économie elle-même qui est souvent la source des différentes pollutions. Donc, c'est indispensable que les journalistes et les médias y réfléchissent. Q.O.: Est-ce que c'est facile d'introduire ce sujet dans les pays qui vivent la guerre et qui vivent des conflits ? J.K.: Non, bien sûr que c'est compliqué mais c'est indispensable. Le fait de pousser la réflexion sur ce terrain, c'est aussi une façon d'aider les journalistes et les médias à prendre en compte cette dimension. Il n'y a pas une dimension de l'environnement en dehors des réalités politique, économique, géostratégique avec tout ce que cela comporte. La question de l'environnement est une question transversale. Par exemple, elle se pose en termes de la nature de l'économie. Quand on a une économie qui est tournée essentiellement vers le profit quelles que soient les conditions dans lesquelles elle se développe pour l'environnement et en faisant fi des conséquences qu'il peut y avoir sur cet environnement, alors évidemment, on ne peut pas seulement traiter la question de l'environnement, il faut aussi bien traiter les questions qui ont trait à la nature même de l'économie ou une question sociale? Donc, c'est très variable d'un pays à l'autre. C'est sûr qu'un pays en guerre, ce n'est pas sa première préoccupation. Mais dans les pays développés, on se rend compte que ce n'est pas non plus toujours la première préoccupation. Alors que cette question devrait l'être de plus en plus. C'est une question centrale. Q.O.: Faut-il une spécialisation ou une formation pour les journalistes qui traitent les questions environnementales ? J.K.: La formation est toujours un atout supplémentaire. Mais puisque la question de l'environnement est une question transversale, donc, il faut une démarche de journaliste pour vérifier l'information sur l'environnement de la même façon que l'on vérifie pour d'autres questions. Ce n'est pas toujours acquis dans les pays francophones mais il faut la renforcer. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas faire appel à des spécialistes. Un journaliste doit être capable de traiter les questions de l'environnement aussi bien que les questions économiques que les questions sociales. Bien sûr, c'est bien d'avoir des spécialistes mais en même temps, c'est parfois dangereux. Il vaut mieux avoir des journalistes généralistes capables de restituer les questions de l'environnement dans leur contexte. Généralistes, veut dire qu'ils sont capables de traiter toute une série de questions, sociale, économique. Donc, pas forcément une spécialisation. Q.O.: «Le poids des lobbies sur les médias », le thème d'un atelier de ce symposium. Qu'avez-vous à dire sur le sujet ? J.K.: La position de fond est de lutter contre la superficialité. Sur toutes les questions qui se posent, il est nécessaire pour les journalistes et pour les médias d'approfondir ces questions. Il ne faut pas prendre un communiqué de presse ou un communiqué qui peut prendre les allures d'un communiqué scientifique, même s'il n'en est pas un toujours, sans avoir creusé l'information. Il faut passer du temps pour vérifier l''information, pour croiser les sources et contrôler tout ce qui nous a été dit. Souvent, les lobbies agissent de cette façon en essayant de tromper la vigilance des journalistes par de fausses informations. Ces fausses informations son souvent difficiles à vérifier. Cela demande du temps. Donc, c'est compliqué parce que ça vient heurter la logique économique des médias. Souvent, les journalistes n'ont, malheureusement, pas suffisamment de temps pour vérifier l'information. Il faut absolument s'attacher, pas par différents moyens, mais par des méthodes de travail, d'une part, et par des exigences dans la profession, d'autre part, s'attacher à avoir le temps de vérifier l'information. 'est important pour la qualité du média qui a tout à y gagner quand son information est juste. Alors, il y a plusieurs lecteurs qui se tourneront vers ce média lorsqu'ils se rendent compte que c'est de l'information fiable. Puis on a tout à gagner, pour les gens eux-mêmes qui sont mieux informés, et pour l'image des journalistes qui n'apparaissent pas comme des journalistes colportant des erreurs. Q.O.: La presse électronique et les réseaux sociaux sont devenus de véritables concurrents aux médias écrits à cause du facteur temps. Comment y faire face? J.K.: C'est une réalité qu'il faut prendre en compte. Il ne s'agit pas de la combattre. Il faut, à la fois apprendre à travailler plus vite pour les journalistes parce qu'en même temps, c'est vrai que l'internet crée des obligations nouvelles. En même temps, l'internet donne des possibilités de vérifier l'information plus rapidement parce qu'on a énormément de sources à notre disposition qu'on n'avait pas avant. Ça peut aller très vite et il faut apprendre à se servir d'Internet. Il ne faut pas considérer que c'est un handicap mais il faut le considérer aussi comme un atout. Cela veut dire que cette vigilance ne doit pas se relâcher. Parfois, il vaut mieux attendre quelques minutes ou quelques heures avant de donner une information et on a les moyens de la vérifier. Ce qu'il faut, c'est ne pas céder à la première tentation qui consiste à dire quand une information arrive, elle est bonne et on la passe. Non, elle me paraît bonne mais je la vérifie quand même. Et je la vérifie en croisant les sources. Ce sont les réflexes professionnels des journalistes, il faut y revenir. Il faut absolument les accentuer même. Q.O.: Quelle suite donner à ce symposium? J.K.: La suite appartient aux sections de l'UPF. C'est le premier symposium organisé sur la question de l'environnement. C'est enrichissant et c'est très encourageant parce que je trouve que les échanges ont vraiment été fructueux et riches. L'idée de reconduire cette expérience, année après année, ici à Monaco qui est un centre intéressant sur ce point de vue commence à faire son chemin. Cette idée a été avancée au prince Albert II au moment de la cérémonie d'ouverture. Mais évidement, il nous faut des soutiens financiers pour ça. Comme le prince est très investi dans l'environnement, il a eu l'air d'accepter cette idée. Dans ces conditions, on va voir. Il faudra prendre une décision qui s'impose. L'UPF n'est pas riche et donc, il faut qu'on trouve les moyens de se développer. Il est certain, il faut poursuivre ces échanges. Q.O.: Une nouvelle section UPF Algérie ? J.K.: La nouvelle section sera créée dans la démocratie et la transparence. Il y a des adhérents à l'UPF en Algérie. Ils sont de plus en plus nombreux et nous souhaitons que l'ensemble de ces adhérents se réunissent pour désigner eux-mêmes leur structure et leur président. Le pouvoir de l'UPF est de destituer tel ou tel président si nous considérons que la démocratie n'a pas été au centre de son action. Il faut qu'il soit élu et élu régulièrement, qu'il y ait une assemblée générale avec un rapport moral. Bref qu'il soit transparent. Or en Algérie, on a constaté que l'ancienne structure de l'UPF ne correspondait pas à cette exigence de démocratie. Donc, nous avons demandé à l'ancien président des éclaircissements qu'il n'a pas pu nous fournir. Nous lui avons donc retiré notre confiance. Maintenant, il faut sur cette base élire un nouveau président. En attendant, nous avons demandé au journaliste Zine Cherfaoui, s'il pouvait participer pour la création d'une nouvelle section. Il a donné son accord. Maintenant, c'est à nos confrères algériens de se réunir et d'élire leur président. |
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