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Suite et fin
En ce sens, il est loisible de re lever dans plusieurs décisions relatives au point de départ du délai de prescription, il ne s'agit pas de la date de conclusion du contrat puisque s'agissant d'un contrat à exécution successive, le fait dommageable se poursuit tout au long de l'exécution du contrat (Cour d'Appel de Versailles, 20 janvier 2005, Jurisdata 2005-269841) ; lorsque le contrat a été qualifié de successif, la prescription de l'article 1304 du code civil ne saurait être opposée (Cour d'Appel de Poitiers, 18 novembre 1992, (Jurisdata 1992-049696) ; et surtout la prescription quinquennale ne s'applique pas lorsque la créance dépend d'éléments qui ne sont pas connus du créancier et qui, en particulier, doivent résulter de déclarations que le débiteur est tenu de faire (Cass. Civ. 1ère, 13 février 2007, n° de pourvoi : 05-12016 ; Cass. Soc. 26 septembre 2007, pourvoi n° 06-44246) ; la prescription de l'article 1304 ne s'applique pas dès lors que l'action s'analyse en une demande de paiement d'une rémunération ne présentant pas le caractère de salaire (Cass. soc. 25 janvier 2006, Pourvoi n° 03-46618). Et même en cas d'application de l'article 1304 u Code civil, la prescription court à compter de la découverte du vice (Cass. civ. 1ère, 30 janvier 2007, Pourvoi n° 05-19352) ; étant rappelé que la clause de rémunération «substantielle dans l'économe du contrat, vicie celui-ci dans son ensemble et emporte nécessairement sa nullité» d'autant plus que les décomptes remis ne permettent pas à l'auteur de vérifier l'exactitude des comptes en ce qu'ils ne répondent pas aux prescriptions légales (CA Paris, 4è Chambre, 22 mars 2006, RIDA, juillet 2006, n° 209, p. 38 et s.). Cette dernière décision se rapproche d'ailleurs de celle de la même Cour qui a prononcé la nullité du contrat d'édition et de sa clause qui prévoyait un taux nul pour une première tranche d'exemplaires vendus 0% pour le premier mille (CA Paris, 10 décembre 2004, RIDA 2004, avril 2005, p. 286). Et la prescription soulevée par l'éditeur est inopérante car la violation de l'article 131-4 du CPI constitue une règle d'ordre public de direction dont la violation entraîne la nullité absolue du contrat type litigieux. La doctrine estime qu' «il parait logique de considérer que la règle de l'article 131-4 constitue une règle d'ordre public de direction dont la violation entraîne la nullité absolue du contrat» (Daniel BECOURT : Réflexions sur le contrat d'édition) et la jurisprudence se prononce le plus souvent pour la résiliation du contrat (Cass. 1ère 24 novembre 1993 : RIDA juillet 1994, 161/293 rejetant C. Paris 5 décembre 1990 ; ibid., et C. Paris 24 novembre 1987 : RIDA janvier 1988, 135/96). Pour GAUTIER : «Quoiqu'en dise la Cour de cassation, une véritable nullité absolue, relevant de l'ordre public de direction puisque l'auteur ne peut finalement pas disposer du régime de sa rémunération» (page 523) ; ce d'autant plus que : «L'essentiel n'est-il pas d'assurer l'information de l'auteur et donc d'éclairer son consentement ?... La nullité est absolue, elle peut donc être demandée pendant trente ans?Les tribunaux peuvent donc réparer les injustices trop scandaleuses. On voit bien que la doctrine et la jurisprudence s'accordent sur le caractère absolu de la nullité (application de la prescription trentenaire) réclamée par Monsieur Y à défaut de pouvoir qualifier les contrats types litigieux de contrats à exécution successive. Subsidiairement, pour l'auteur, la prescription soulevée par l'éditeur est inopérante car elle est inapplicable en l'espèce ; en effet, «Il est illogique que l'action en nullité puisse s'éteindre avant que son titulaire n'ait pris conscience de la possibilité de l'exercer» (Pierre SIRINELLI, Propriété littéraire et artistique, Le Dalloz, 2001, n° 32, p. 2634, qui rappelle que la doctrine considère que la plupart du temps les conventions relatives au droit d'auteur sont à exécution successive, ce qui entraîne d'autant le report du point de départ du délai?) et la Cour de cassation elle-même rappelle que la violation des dispositions du CPI est sanctionnée par une nullité relative soumise à la prescription quinquennale à compter de la découverte du vice (Cass. Civ. 1ère, 30 janvier 2007, n° 05-19352). Pour Yves CHARTIER : «A ignorer la doctrine, la Cour de cassation appauvrit sa réflexion» (Cf. Yves CHARTIER, agrégé des facultés de droit, Conseiller honoraire à la Cour de cassation, «La Cour de cassation», 2ème édition, Dalloz pour qui «la résistance des juges du fond se traduit essentiellement par leurs décisions et peut aller, on le sait jusqu'à une rébellion, lorsque l'affaire revient devant eux sur renvoi après un arrêt de cassation auquel ils refusent de se conformer» (p. 130). Par ailleurs, face à la réticence de l'éditeur à remplir son obligation précontractuelle de renseignement, il y a là une impossibilité d'agir, d'autant que l'éditeur ne produit aux débats aucun élément de nature à l'exonérer de sa responsabilité en la matière ; en ce sens, l'intention dolosive est constituée par les agissements de l'éditeur dont la réticence à informer l'auteur ont manifestement pour objet de le tromper et de l'amener à contracter ; ce silence de l'éditeur dissimule à l'auteur l'illicéité des clauses contractuelles essentielles, notamment celle de la rémunération. Lorsque le contractant (l'éditeur) a eu connaissance de l'erreur, il aurait dû avertir l'auteur; il ne saurait donc se plaindre du préjudice que lui cause la nullité d'un contrat dont il avait le devoir d'empêcher la conclusion ; ce par loyauté contractuelle. S'agissant d'une action en nullité pour dol soumise à la prescription quinquennale, l'article 1304 du Code Civil, conforté par la jurisprudence, stipule que le délai de prescription ne court qu'à compter du jour où le dol a été découvert ; ainsi : Civ. 1ère, 31 mai 1972, Bull. I n° 142, p. 124 ; TGI Paris, Ch. 1, Sect. 1, 13 mai 1998, Juris Data n° 1998-044378); CA Colmar, Ch. Civ. 2, Sect. A, 6 juin 2002, Juris Data n° 2002-183192 ; Civ. 3ème, 2 juillet 2003, N° de pourvoi 02-11091 ; CA Paris, 4ème Ch., 12 janv. 2000, RIDA Oct. 2000, p. 280 ; Cass. Civ. 1ère, 30 janvier 2007, n° 05-19352). Le délai de prescription n'a pu commencer à courir antérieurement à sa prise de connaissance des éléments permettant à l'auteur d'exercer son action, notamment ceux relatifs aux obligations à la charge de l'éditeur, ainsi : celle des redditions des comptes annuelles (produites de façon irrégulière depuis la publication des ouvrages de Monsieur Y. jusqu'à 2000, quoique non conformes aux prescriptions légales comme l'exige l'article L 132-14 du CPI ; celle de la rémunération puisque la carence et les négligences fautives de l'éditeur du fait notamment de l'absence d'information de l'auteur quant à l'illicéité de la clause de rémunération dont la société appelante a eu connaissance au moins depuis une décision judiciaire qui date du 30 novembre 1999 l'ayant condamnée; celle de la diffusion commerciale et l'exploitation permanente et suivie de l'œuvre dès lors que l'éditeur admet que ses prestations en la matière -pour autant qu'elles soient suffisantes- datent de 1997. Jusqu'à ces dates précitées, l'auteur a été entretenu dans la croyance légitime que son éditeur était respectueux de ses droits. Violations contractuelles récurrentes par l'éditeur Monsieur Y a soulevé plusieurs violations contractuelles ; ainsi, l'inexécution de l'obligation d'édition : non-respectt des tirages et des délais. L'article 3 des contrats-type litigieux stipule respectivement pour chaque ouvrage que l'éditeur s'engage à publier l'oeuvre dans un délai précis, non respecté dans le cas de l'auteur Y. Et l'article 2 des contrats-type litigieux stipule respectivement pour chaque ouvrage que le chiffre des tirages sera fixé par l'éditeur, mais devra être au minimum de 1000, voire 1500. Cependant, dans ses déclarations effectuées auprès de la Régie du Dépôt Légal de la Bibliothèque Nationale, la Société X précise au titre du chiffre déclaré du tirage pour chaque ouvrage des chiffres moindres qui se révèlent purement fantaisistes ; dès lors, il apparaît que cette Société a violé ses obligations, en ne respectant pas les délais de fabrication et les quantités convenues. En conséquence, la société X ne saurait sérieusement contester que les tirages n'ont pas été respectés (Cf. CA Paris 4ème Chambre ? Section A, 25/06/2003, RIDA, Janv. 2004, p. 249). De même, il y a inexécution de l'obligation de reddition des comptes conformément aux prescriptions légales ; ce défaut de reddition de comptes caractérisant la mauvaise foi et les négligences fautives de l'éditeur quant aux chiffres des tirages et des ventes des ouvrages de Monsieur Y. L'article L 132-13 du CPI dispose que : ?L'éditeur est tenu de rendre compte » et l'article 6 (relevés de compte) du contrat-type litigieux stipule : ?Les comptes de l'ensemble des droits dus à l'Auteur seront arrêtés le 30 juin de chaque année. S'agissant d'une obligation de résultat, la jurisprudence précise que l'éditeur doit rendre compte quelle que soit la modicité des sommes en cause (Paris 4è ch. B 30/04/87 : Juris Data n°024040). Et l'absence de reddition en temps voulu des comptes de l'édition préjudicie à l'auteur en l'empêchant de contrôler l'exploitation effective de ses oeuvres et les droits produits (Cf. CA PARIS ? 4ème chambre ? 24/11/87 ?R.I.D.A. Avril 1988, N°135). Si Monsieur Y a obtenu sporadiquement de la Société X quelques lettres-type versées aux débats par celui-ci et faisant état d'un certain nombre d'exemplaires vendus, il n'a aucun moyen de vérifier l'état des ventes l'empêchant ainsi de contrôler l'exploitation effective de ses oeuvres et les droits produits ; ce, quelle que soit la modicité des redevances qu'il peut en attendre, modicité qui s'explique d'ailleurs par le fait que l'éditeur ne verse pas de redevances sur les 1000 premiers exemplaires (Cf. CA PARIS ? 4ème chambre ? 24/11/87 ?R.I.D.A. avril 1988, N°135, précité) ; ce, outre qu'il est constant que l'éditeur est tenu d'exécuter de bonne foi ses obligations contractuelles; à défaut, le contrat se trouve résilié (Cf. CIV I.. 11 janvier 2000, Bull. 2000, N°6, p.3). En effet, l'article L 132-13 du CPI rappelle que les ?relevés de compte? doivent mentionner de façon distincte le nombre d'exemplaires fabriqués en cours d'exercice, la date et l'importance des tirages, le nombre des exemplaires en stock, le nombre des exemplaires vendus par l'éditeur, le nombre des exemplaires inutilisables ou détruits par cas fortuit ou force majeure et le montant des redevances dues ou versées à l'auteur?. Or, les ?relevés de compte? de ladite Société n'indiquent souvent pas le nombre exact des exemplaires vendus ; cette mention essentielle pour une reddition loyale des comptes fait défaut. Aussi, on ne saurait être étonné des contradictions résultant des différences constatées entre les tirages et le stock, d'une part, et les différences constatées entre le stock et les ventes, d'autre part. Par ailleurs, il faut relever l'inexécution de l'obligation de diffusion commerciale et d'exploitation permanente et suivie de l'œuvre. A cet égard, l'article L 132-12 C.P.I. dispose que : ?L'éditeur est tenu d'assurer à l'oeuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession? et l'article 3 du contrat-type litigieux stipule : ?L'éditeur s'engage à assurer à l'oeuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession?. S'agissant d'une obligation de résultat, la Société X ne saurait se retrancher derrière de prétendues ?erreurs matérielles?, si l'on considère que par le jeu des autres clauses illicites, consistant notamment à fixer un seuil de vente pour la rémunération et à réduire l'assiette servant de base de calcul aux redevances, le non-respect des tirages contractuellement fixés prive Monsieur Y de toute rémunération. Ladite Société ne justifie pas avoir assuré une diffusion commerciale, conforme aux usages de la profession, en approvisionnant notamment le réseau traditionnel des librairies, afin de mettre l'oeuvre à la disposition du public le plus large. Et surtout, elle ne justifie pas avoir effectué la moindre publicité pour assurer la promotion de l'oeuvre, notamment lors de son lancement alors que les travaux de Monsieur Y ont toujours eu un écho favorable auprès de la presse tant écrite que radiophonique, celui-ci s'étant pleinement et personnellement investi pour faire connaître ses ouvrages. Et, pour cause, Monsieur Y a eu à prendre en charge lui-même la promotion de ses ouvrages auprès des milieux littéraires, journalistiques, universitaires et associatifs comme en attestent les lettres qui lui ont été directement adressées par ceux-ci et surtout le dossier de presse qu'il produit aux débats ; ainsi par exemple : des Universités de Laval du Québec et de Stuttgart d'Allemagne), des Associations (lettres qui lui ont été adressées par Rencontres Audiovisuelles, Cercle des Intellectuels Maghrébins, Echo). C'est dans ces conditions, que Monsieur Y a demandé une réparation par la Société X des violations des dispositions légales et de l'inexécution de ses engagements contractuels : à titre principal, il a sollicité la nullité des clauses de rémunération et de cession des droits d'auteur et, conséquemment la résolution des contrats types litigieux avec allocation de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'il a subi du fait de l'illicéité de la clause et ce, conformément à la jurisprudence (Cass. 1ère civ. 9 janvier 199, RIDA juillet 1996, p. 331). Subsidiairement, il a demandé réparation à raison des inexécutions et violations des obligations légales et contractuelles ; la Société X ayant manqué à ses obligations, notamment celles de redditions de comptes et d'exploitation permanente et suivie et de diffusion (Cf. CA Paris, 23 décembre 1969 ; D 70, p. 119) ; à défaut de résiliation, les œuvres de Monsieur Y resteront immobilisées sans retrouver leur public potentiel, et ce pour la durée des droits d'auteur, c'est-à-dire soixante-dix ans (70) après le décès de l'auteur compte tenu du défaut d'exploitation permanente et suivie. Il est constant que le non-respect par l'éditeur de l'obligation d'assurer à l'œuvre une exploitation permanente et une diffusion commerciale suffisante préjudicie gravement à l'auteur et justifie la condamnation de l'éditeur avec allocation de dommages et intérêts à l'auteur (C. cass. 1ère civ. 24 nov. 93, RIDA 1994,-2). Dans la mesure où il y a impossibilité pour l'auteur de mettre ses œuvres à la disposition du public, ce dernier subit un préjudice moral important ; pour ce faire, il a été demandé à la Cour de tenir compte du dossier de presse que l'auteur produit aux débats et duquel il est loisible d'observer l'importance du nombre d'ouvrages publiés et de la durée d'exploitation (plusieurs années depuis leur publication), de l'absence de justificatifs probants relativement aux chiffres avancés par l'éditeur (au demeurant peu crédibles et invérifiables en l'état), de la notoriété de Monsieur Y dans les milieux littéraires, journalistiques et universitaires, de l'écho favorable de l'oeuvre de celui-ci auprès de la presse écrite et audiovisuelle. Ainsi, il a été jugé que l'exploitation des oeuvres concernées, non assortie d'efforts publicitaires significatifs, que l'éditeur n'a pas rempli ses obligations contractuelles et qu'en conséquence de cette appréciation, la Cour a confirmé la décision déjà prononcée en première instance aux torts de l'éditeur et majorée l'indemnité allouée à l'auteur à titre de dommages et intérêts (CA Paris, 4ème Chambre, 13 mars 2002; RIDA n° 194 -octobre 2002-, p.217 et s.) La Cour d'appel accéda aux demandes de l'auteur ; cependant, la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la Cour d'appel au motif notamment que l'auteur ne peut invoquer une décision condamnant le même éditeur pour la computation du délai pour agir de l'auteur fixé à cinq ans à compter de la conclusion du contrat ; ce, relativement à la clause de rémunération jugée illicite. A coup sûr, cette décision de la Cour de cassation anéantit à jamais les intérêts de l'auteur en les immobilisant alors que, selon la très importante jurisprudence des Juridictions de fond (Tribunal et Cour), il serait possible de veiller aux intérêts des parties en présence : auteurs et éditeurs ; sans doute qu'il y aurait lieu d'envisager, eu égard à cette jurisprudence, une réforme salutaire du droit d'auteur pour les uns et les autres. * Avocat N.B : La jurisprudence citée peut être consultée sur le site legifrance. |
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